Autopergamene

Real Lives

articleđŸ‡«đŸ‡· françaisPublished 2007-07-19GamingReview10mn to read

Il est tout naturel de vouloir vivre la vie d’un autre. Partant de ce principe, Real Lives vous propose Ă  travers un jeu de vous mettre le temps d’une vie dans la peau de quelqu’un d’autre. 
Étant assez complexe de dĂ©crire le “jeu”, voici comme Ă  l’accoutumĂ©e un rĂ©cit de partie. Avec moins de screenshots que d’habitude, du fait de la relativement pauvre interface du jeu.

Je prĂ©cise avant quoi que ce soit que pour donner un Ă©ventail assez large du jeu, deux parties seront dĂ©crites. L’une dans la peau d’un petit garçon nĂ© dans une rĂ©gion dite “en dĂ©veloppement”, en Birmanie, dans une famille nombreuse — bref, pas gĂątĂ© par la nature. L’autre, dans l’Iowa aux États Unis, dans la peau d’une petite fille AmĂ©ricaine de famille dans la moyenne si ce n’est lĂ©gĂšrement au-dessus. Chacun a ses propres caractĂ©ristiques (Intelligence, dons artistiques, force, une jauge de conscience variant selon vos actes, etc) dĂ©pendant des parents et du hasard. Ils influent sur votre destin dans le jeu.

Le récit de partie suivra le chronologie de ma partie, se déroulant année aprÚs année.

  • — Je m’appelle Totsakan Tomson ; nĂ© en Birmanie du centre-ouest Ă  Sagaing. J’ai une mĂšre nommĂ©e Tuptim (27 ans) et un pĂšre, Pairat (30 ans). J’ai aussi trois frĂšres et trois soeurs dont je me suis si peu prĂ©occupĂ© durant ma partie que leur noms ne seront mĂȘme presque pas Ă©voquĂ©s ailleurs que dans ce paragraphe; leurs noms sont pĂȘle-mĂȘle Pramoj, Lap, Lek, Tui, Kovit et Prang.

Un an aprĂšs ma naissance, mon quatriĂšme frĂšre Ditaka vient au monde; et l’annĂ©e suivante la paix est signĂ©e dans mon pays. Le jeu ne commençant que vers 6/8 ans Ă  vous laisser les commandes, j’ai assistĂ© toute mon enfance Ă  de joyeux Ă©vĂšnements, dont je retiendrai notamment les six maladies de mon pĂšre, la mienne, les deux de ma mĂšre, et la mort d’un de mes frĂšres. En gĂ©nĂ©ral, Ă  ce stade-lĂ , on se dit “WTF” tant le jeu semble vous pourrir sans vous laisser faire quoi que ce soit.

À six ans j’entre Ă  l’école, et il faut alors choisir mes loisirs. N’ayant pas envie de moisir comme une merde dans ce jeu, je mise tout sur ce qui pourrait me sortir de lĂ . Je dĂ©coche “Jouer” et coche “Lire/Étudier”. Je coche l’entraĂźnement physique, et le sport. Je me dis qu’à ce stade lĂ  ça peut pas faire de mal. Les activitĂ©s fonctionnent de maniĂšre assez Ă©trange dans Real Lives ; de temps en temps le jeu vous en laisse choisir une supplĂ©mentaire, vous laissant au fil du temps jongler avec de plus en plus d’activitĂ©s. Cependant en cas de dĂ©mĂ©nagement par exemple, vous devrez repartir du quota de base avant d’à nouveau vous constituer un emploi du temps organisĂ© vous laissant ajouter une activitĂ©, etc.

Toute mon enfance se passe Ă  travers les Ă©vĂšnements qui touchent ma famille, dont le dĂ©part prĂ©cipitĂ© de plusieurs de mes proches (au sens propre, ils sont pas morts, juste partis de leur propre chef pour travailler, parfois trĂšs jeunes) ; ou encore les batailles rangĂ©es qui ont lieu rĂ©guliĂšrement. Jusque mes douze ans, j’ai pu choisir nombre de nouvelles activitĂ©s, dont l’étude politique et l’art (que j’ai plus tard abandonnĂ©). Et c’est cette mĂȘme annĂ©e de mes douze ans que le jeu m’annonce comme si de rien n’était “I became a woman this year after the ceremony of nahtwin.”. 
ok, si tu veux copain. Pourtant, bien qu’étant censĂ© ĂȘtre une femme, l’annĂ©e suivante Ă  treize ans je rencontre Achara, et pour la garder elle et mon avenir, l’annĂ©e suivante je dĂ©cide d’esquiver le tabac pour ne pas me moisir mon avenir. Et lĂ  c’est le drame. Alors qu’à seize ans je participe Ă  des “efforts humanitaires” bĂ©nĂ©volement, mon destin prend un virage serrĂ©. Du fait de mes “activitĂ©s politiques” je suis renvoyĂ© de mon Ă©cole comme un paria, et envoyĂ© Ă  l’armĂ©e. JOIE §

C’est une fois quittĂ© le domicile familial que le jeu commence vraiment. Effectivement, tout d’un coup on est envahi par les choses Ă  gĂ©rer. Entre autres le budget mensuel et le compte en banque. Tout content de ma premiĂšre paye, je place mes 200k sur un compte en banque en attendant les intĂ©rĂȘts. Deux ans plus tard
 j’ai pas bougĂ©. Ayant vite compris que l’armĂ©e m’avait pris sous son aile, j’avais dĂ©cidĂ© d’y rester et de profiter sagement de la paye. Et ainsi deux ans plus tard, et grĂące Ă  l’argent gagnĂ©, moi et Achara me marions l’annĂ©e de mes dix-huit ans. C’est cette annĂ©e que j’ai dĂ©cidĂ© d’un peu faire quelque chose de mon argent, en investissant ça et lĂ  et en voyant ce qui rapporte vraiment.

L’annĂ©e suivante, le jeu m’informe que le gouvernement dĂ©cide de dĂ©sormais faire des arrestations alĂ©atoires de personnes pour des interrogatoires trĂšs sĂ©vĂšres ; et bien Ă©videmment, Ă  dix-neuf ans je me fais arrĂȘter et interroger. Ayant jurĂ© Ă  mon pote qui suivait la partie que je perdrai pas comme une merde juste parce que le jeu ne m’avait pas gĂątĂ©, je balance tous ceux qu’il faut. Peu importe si tous ceux avec qui je traĂźnais pour mes activitĂ©s passĂ©es doivent en crever, je comptais pas perdre. Contents de ma collaboration (ouais je suis un connard, et alors) les autoritĂ©s me relĂąchent. Cette mĂȘme annĂ©e, le mariage s’étant bien passĂ© comme prĂ©vu, je quitte cette ville de merde pour Magwe, non loin. Une bonne nouvelle contrastĂ©e par une moins bonne, puisque l’annĂ©e suivante le goitre que j’avais contractĂ© pendant mon enfance, et qui s’était fait oublier, revient de plus belle.

Entre-temps et les annĂ©es qui suivirent, j’ai vite compris que la seule valeur sĂ»re pour l’investissement, ce sont les territoires. Bien sĂ»r de grosses mises sont requises, mais cela en a toujours valu la peine tout le long de la partie, me permettant de m’enrichir pour peu Ă  peu quitter ma condition initiale. Plus tard, ma femme tombera malade et aprĂšs un nouveau dĂ©mĂ©nagement, je pars de l’armĂ©e pour me faire engager comme vendeur. Et c’est lorsque l’on a enfin un vrai travail que le jeu nous permet de faire quelque chose de gĂ©nial : harceler notre patron pour une augmentation. Deux ans plus tard, Ă  vingt six ans, ma femme tombe enceinte et mon premier fils naĂźt, un petit garçon que je nomme amoureusement Ittiporn.

L’annĂ©e suivante fut dĂ©cisive. Le jeu m’informe qu’une guerre civile vient d’ĂȘtre dĂ©clarĂ©e en Chine et, craignant pour ma peau, je pars pour Bombay en Inde, un pays qui me promet plus de richesses et une meilleure condition. À trente ans la paix est rĂ©tablie. Entre-temps ma femme est devenue voleuse de biens mineurs alors que moi ai continuĂ© ma carriĂšre de vendeur me rapportant nombre de roupies. Et c’est l’annĂ©e suivante que les rĂ©jouissances commencent et qu’on dĂ©couvre l’envers du dĂ©cors. Ma maison est vandalisĂ©e, et une inondation majeure touche l’Inde faisait 1853 morts et 26 000 000 de blessĂ©s — une inondation Ă  laquelle j’échappe miraculeusement. Cette mĂȘme annĂ©e mon fils a un accident de voiture duquel il ressort sans lĂ©sions graves.

Puis passĂšrent les annĂ©es, un dĂ©mĂ©nagement, une promotion ; et la naissance d’une fille Abha qui mourra l’annĂ©e suivante d’une infection respiratoire. Suivie de ma mĂšre, d’une attaque. Cette chĂšre mĂšre qui me lĂšgue la belle somme de 50 000 roupies. C’est Ă  trente-six ans que je quitte mon mĂ©tier de vendeur pour celui de “forman” (je sais mĂȘme pas ce que c’est mais ça payait bien). Il faut savoir que le jeu sĂ©lectionne les mĂ©tiers disponibles selon mes qualifications, celles-ci dĂ©pendant de mes Ă©tudes et de mon expĂ©rience.

À quarante ans j’adopte Roshan, ma deuxiĂšme fille, alors que Ittiporn entre dans une Ă©cole de commerce dans laquelle il sautera mĂȘme une annĂ©e FFS. D’ailleurs cinq ans plus tard il dĂ©mĂ©nagera loin de moi. À ce stade-lĂ  du jeu j’étais plutĂŽt fier de ma partie, parce que je m’étais quand mĂȘme bien sorti de la merde. J’avais assez de fric pour assurer une qualitĂ© de vie juste un brin de la moyenne, ce qui me suffisait amplement au vu de mon point de dĂ©part. Et lĂ , je rĂ©alise mon rĂȘve, stupide mais mon rĂȘve : la cinquantaine fraĂźchement passĂ©e, je dĂ©mĂ©nage Ă  Toulon, dans le sud de la France (yay). Cependant, c’est suite Ă  deux cambriolages et au divorce avec ma femme (qui entre-temps Ă©tait devenue une sale droguĂ©e ne ramenant rien Ă  la maison) que se dĂ©cide un dĂ©mĂ©nagement dans une zone un peu plus tranquille, prĂšs de Belfort. C’est mĂȘme lĂ  que j’ai remarquĂ© que le jeu Ă©tablissait les conditions de vie dans les pays selon des statistiques et des donnĂ©es, sur des Ă©chelles de 1 Ă  7 oĂč 7 est le pire. Ainsi par exemple, la France dans “Droits civiques” et “Droits Politiques” avait 1, alors que non loin “Corruption” affichait 3, ah ha.

À cinquante six ans, divorcĂ©, je pars Ă  la quĂȘte d’un nouvel amour. Seulement, les filles se suivent, et aprĂšs six rĂąteaux, je m’engage yeux fermĂ©s avec Marie-JosĂ©e (oui, yikes) et lui promet le mariage, ce qui se rĂ©alise l’annĂ©e suivante. Pendant ce temps, ma deuxiĂšme fille Roshan se marie avec Jean-Paul Gillette (hqhq) et ils ont ensemble une fille, RenĂ©e
 je sais pas dans quelle banque de prĂ©noms ils ont pĂȘchĂ©, mais je pense qu’on a quand mĂȘme un beau paquet de trucs infĂąmes Ă  porter.

À soixante-neuf ans, aprĂšs avoir quittĂ© le travail de foreman (trop vieux) puis celui de vendeur, j’arrĂȘte le travail et dĂ©mĂ©nage en PolynĂ©sie Française, Ă  Papeete. Ma retraite m’indique que j’ai assez pour vivre jusqu’à 115 ans
 ce que malheureusement mon Ă©tat de santĂ©, mon goitre et la maladie que j’ai attrapĂ©e en Inde, contredisent. Six ans plus tard, une tempĂȘte tropicale majeure frappe l’üle, ma zone en particulier, et on me demande 19000000 CFP d’investissement, que je donne en voyant la moitiĂ© de mes Ă©conomies partir.

Une tristesse de courte durĂ©e, puisque peu d’annĂ©es plus tard aprĂšs une fin de vie difficile (cambriolage, et la mort de ma femme d’un cancer du sein, Ă  ses soixante-dix-neuf ans) je m’éteins en silence, Ă  quatre-vingt-un ans, d’une infection.

Une vie bien remplie donc, que j’ai passĂ© Ă  tout faire pour me sortir de lĂ  oĂč j’étais Ă  la base. Au final je suis content d’avoir tenu 81 ans et d’avoir pu ĂȘtre ce que je redoutais ne jamais ĂȘtre avec un dĂ©part de partie si dĂ©courageant.


Judith Robertson habite Des Moines, dans l’Iowa. De jeunes parents Irene (18 ans) et William (24 ans). Ma seule soeur est Judy, nĂ©e un an avant moi.

Et lĂ , c’est la partie dite “rigolade”. Celle oĂč on enchaĂźne les annĂ©es le sourire au lĂšvre. Mon seul choix a Ă©tĂ© Ă  six ans, celui de voler le jouet d’un autre. À treize ans, devant mes rĂ©sultats excellents, je saute une annĂ©e et rencontre dans ma nouvelle classe Wayne Stevens. Une rencontre que mes parents dĂ©sapprouvent complĂštement, et sous leur pression je romps avec lui (salauds). J’avoue ne pas avoir beaucoup de problĂšme avec les mecs dans mes premiĂšres annĂ©es, et j’en vois dĂ©filer beaucoup. Mes Ă©tudes passent sans souci, j’évite l’alcool quand demandĂ©, et mĂȘme si mon petit ami est envoyĂ© en “academic probation” j’en trouve un autre sous peu.

Bref, je me la coule douce, jusqu’au jour de mes 22 ans oĂč la nouvelle tombe : je suis stĂ©rile
 bordel. Alors je me rĂ©fugie dans l’argent, y a pas de raison. À 23 ans je deviens Technicienne d’Industrie avec une paye d’environ 5000$ par mois. Une paye qui ne cessera d’augmenter tout au long de la partie sous la pression de mes demandes d’augmentation.

À 28 ans je dĂ©mĂ©nage Ă  Los Angeles pour craner avec mon fric. Et le jeu a beau m’informer que mon pays est impliquĂ© dans une guerre et que des soldats sont tuĂ©s, ’nafout. Ma mĂšre sort de dĂ©pression, ce genre de trucs. Trop la joie. Sauf cĂŽtĂ© mecs. Parce qu’il faut pas se leurrer, comme je suis pas fertile, bizarrement les trois quarts des mecs de mon Ăąge me rejettent aprĂšs un an. Ainsi j’en voit passer des dizaines, dont notamment Douglas Nichols avec qui j’ai adoptĂ© la petite Anna. Un mari aimant donc, qui avec ma chance, mourra d’un cancer de l’estomac peu aprĂšs. Anecdote drĂŽle : j’ai Ă  un moment Ă©tĂ© rejetĂ© par “Daniel Gilbertte” \o/ En fait, en vue de l’échec de ma vie de famille, j’ai quittĂ© mon travail pour devenir Inspectrice, un travail qui rapportait Ă  la fin de ma partie une belle somme de plus de 16 000$ par mois. Ouais, en fait, j’ai tout axĂ© sur le fric et ça m’a bien rĂ©ussi. À la fin de ma partie, j’avais la plus belle maison, je mangeais trois fois plus qu’à ma faim, achetais les yeux fermĂ©s, et je trouvais mĂȘme le temps d’en donner un peu Ă  ces sales pauvres. À partir de ce point, plus rien ne peut vous dĂ©ranger, on m’a volĂ© deux fois l’une de mes quatre voitures, mes parents sont dĂ©cĂ©dĂ©s de vieillesse, ma fille fume, et j’en passe.

Pendant que mon assiette et mon compte en banque se remplissent, j’enchaĂźne mariage sur mariage, et divorce sur divorce; chaque Ă©tape ne durant jamais plus d’un an tant je devais ĂȘtre repoussante Ă  ce moment du jeu.

Et soudainement le jeu m’achĂšve. Alors qu’avec mon personnage nĂ© de rien j’ai vĂ©cu une longue vie intĂ©ressante, CETTE SALLE POURRIE GÂTÉE DE JUDITH MEURT DU DIABÈTE À 63 ANS.

“MAIS C’EST QUOI CE JEU§§”.


Bref, vous l’aurez compris, Real Lives est un jeu trĂšs ouvert et pour lequel les rĂ©cits de partie sont souvent intĂ©ressants Ă  lire et Ă  vivre. Ainsi j’ai eu et vu des parties comme policier corrompus au Quebec vivant avec leur tranquille famille, de personnes nĂ©es de clochards et se prostituant pour vivre, d’éthiopiens devenus sportifs de haut niveau, et mĂȘme une partie que j’ai lancĂ©e et ai perdu une annĂ©e plus tard suite Ă  une malformation natale.

Alors mĂȘme si l’interface repousse un peu au dĂ©but, j’ai trouvĂ© quelque chose dans ce programme qui le rend intĂ©ressant et ce Ă  chaque partie. On ressent tout de mĂȘme une vraie envie des personnes Ă  l’origine de vous faire prendre conscience des conditions de vie dans d’autres pays, de la difficultĂ© parfois insurmontable Ă  se sortir de sa condition de vie d’origine ; cette idĂ©e de nous faire penser Ă  “Et si j’étais pas nĂ© en France”.

Si la curiositĂ© vous pique, ça se tĂ©lĂ©charge par lĂ  : http://www.educationalsimulations.com/eval.php Remplissez le formulaire Ă  l’arrache et faites OK.

Six screenshots moisis pris pendant ma partie avec Judith (certains uploadent encore) : http://the8day.info/Articles/RL01.jpg http://the8day.info/Articles/RL02.jpg http://the8day.info/Articles/RL03.jpg http://the8day.info/Articles/RL04.jpg http://the8day.info/Articles/RL05.jpg http://the8day.info/Articles/RL06.jpg

Et un screenshot des possibilitĂ©s et options du jeu lui-mĂȘme : http://the8day.info/Articles/RL07.PNG

Sur ce.

P.S : J’ai pas relu et je suis fatiguĂ©. S’il y a des fautes, je m’en fous. Merci de votre attention.

© 2025 - Emma Fabre - About

Real Lives

articleđŸ‡«đŸ‡· françaisPublished 2007-07-19GamingReview10mn to read

Il est tout naturel de vouloir vivre la vie d’un autre. Partant de ce principe, Real Lives vous propose Ă  travers un jeu de vous mettre le temps d’une vie dans la peau de quelqu’un d’autre. 
Étant assez complexe de dĂ©crire le “jeu”, voici comme Ă  l’accoutumĂ©e un rĂ©cit de partie. Avec moins de screenshots que d’habitude, du fait de la relativement pauvre interface du jeu.

Je prĂ©cise avant quoi que ce soit que pour donner un Ă©ventail assez large du jeu, deux parties seront dĂ©crites. L’une dans la peau d’un petit garçon nĂ© dans une rĂ©gion dite “en dĂ©veloppement”, en Birmanie, dans une famille nombreuse — bref, pas gĂątĂ© par la nature. L’autre, dans l’Iowa aux États Unis, dans la peau d’une petite fille AmĂ©ricaine de famille dans la moyenne si ce n’est lĂ©gĂšrement au-dessus. Chacun a ses propres caractĂ©ristiques (Intelligence, dons artistiques, force, une jauge de conscience variant selon vos actes, etc) dĂ©pendant des parents et du hasard. Ils influent sur votre destin dans le jeu.

Le récit de partie suivra le chronologie de ma partie, se déroulant année aprÚs année.

  • — Je m’appelle Totsakan Tomson ; nĂ© en Birmanie du centre-ouest Ă  Sagaing. J’ai une mĂšre nommĂ©e Tuptim (27 ans) et un pĂšre, Pairat (30 ans). J’ai aussi trois frĂšres et trois soeurs dont je me suis si peu prĂ©occupĂ© durant ma partie que leur noms ne seront mĂȘme presque pas Ă©voquĂ©s ailleurs que dans ce paragraphe; leurs noms sont pĂȘle-mĂȘle Pramoj, Lap, Lek, Tui, Kovit et Prang.

Un an aprĂšs ma naissance, mon quatriĂšme frĂšre Ditaka vient au monde; et l’annĂ©e suivante la paix est signĂ©e dans mon pays. Le jeu ne commençant que vers 6/8 ans Ă  vous laisser les commandes, j’ai assistĂ© toute mon enfance Ă  de joyeux Ă©vĂšnements, dont je retiendrai notamment les six maladies de mon pĂšre, la mienne, les deux de ma mĂšre, et la mort d’un de mes frĂšres. En gĂ©nĂ©ral, Ă  ce stade-lĂ , on se dit “WTF” tant le jeu semble vous pourrir sans vous laisser faire quoi que ce soit.

À six ans j’entre Ă  l’école, et il faut alors choisir mes loisirs. N’ayant pas envie de moisir comme une merde dans ce jeu, je mise tout sur ce qui pourrait me sortir de lĂ . Je dĂ©coche “Jouer” et coche “Lire/Étudier”. Je coche l’entraĂźnement physique, et le sport. Je me dis qu’à ce stade lĂ  ça peut pas faire de mal. Les activitĂ©s fonctionnent de maniĂšre assez Ă©trange dans Real Lives ; de temps en temps le jeu vous en laisse choisir une supplĂ©mentaire, vous laissant au fil du temps jongler avec de plus en plus d’activitĂ©s. Cependant en cas de dĂ©mĂ©nagement par exemple, vous devrez repartir du quota de base avant d’à nouveau vous constituer un emploi du temps organisĂ© vous laissant ajouter une activitĂ©, etc.

Toute mon enfance se passe Ă  travers les Ă©vĂšnements qui touchent ma famille, dont le dĂ©part prĂ©cipitĂ© de plusieurs de mes proches (au sens propre, ils sont pas morts, juste partis de leur propre chef pour travailler, parfois trĂšs jeunes) ; ou encore les batailles rangĂ©es qui ont lieu rĂ©guliĂšrement. Jusque mes douze ans, j’ai pu choisir nombre de nouvelles activitĂ©s, dont l’étude politique et l’art (que j’ai plus tard abandonnĂ©). Et c’est cette mĂȘme annĂ©e de mes douze ans que le jeu m’annonce comme si de rien n’était “I became a woman this year after the ceremony of nahtwin.”. 
ok, si tu veux copain. Pourtant, bien qu’étant censĂ© ĂȘtre une femme, l’annĂ©e suivante Ă  treize ans je rencontre Achara, et pour la garder elle et mon avenir, l’annĂ©e suivante je dĂ©cide d’esquiver le tabac pour ne pas me moisir mon avenir. Et lĂ  c’est le drame. Alors qu’à seize ans je participe Ă  des “efforts humanitaires” bĂ©nĂ©volement, mon destin prend un virage serrĂ©. Du fait de mes “activitĂ©s politiques” je suis renvoyĂ© de mon Ă©cole comme un paria, et envoyĂ© Ă  l’armĂ©e. JOIE §

C’est une fois quittĂ© le domicile familial que le jeu commence vraiment. Effectivement, tout d’un coup on est envahi par les choses Ă  gĂ©rer. Entre autres le budget mensuel et le compte en banque. Tout content de ma premiĂšre paye, je place mes 200k sur un compte en banque en attendant les intĂ©rĂȘts. Deux ans plus tard
 j’ai pas bougĂ©. Ayant vite compris que l’armĂ©e m’avait pris sous son aile, j’avais dĂ©cidĂ© d’y rester et de profiter sagement de la paye. Et ainsi deux ans plus tard, et grĂące Ă  l’argent gagnĂ©, moi et Achara me marions l’annĂ©e de mes dix-huit ans. C’est cette annĂ©e que j’ai dĂ©cidĂ© d’un peu faire quelque chose de mon argent, en investissant ça et lĂ  et en voyant ce qui rapporte vraiment.

L’annĂ©e suivante, le jeu m’informe que le gouvernement dĂ©cide de dĂ©sormais faire des arrestations alĂ©atoires de personnes pour des interrogatoires trĂšs sĂ©vĂšres ; et bien Ă©videmment, Ă  dix-neuf ans je me fais arrĂȘter et interroger. Ayant jurĂ© Ă  mon pote qui suivait la partie que je perdrai pas comme une merde juste parce que le jeu ne m’avait pas gĂątĂ©, je balance tous ceux qu’il faut. Peu importe si tous ceux avec qui je traĂźnais pour mes activitĂ©s passĂ©es doivent en crever, je comptais pas perdre. Contents de ma collaboration (ouais je suis un connard, et alors) les autoritĂ©s me relĂąchent. Cette mĂȘme annĂ©e, le mariage s’étant bien passĂ© comme prĂ©vu, je quitte cette ville de merde pour Magwe, non loin. Une bonne nouvelle contrastĂ©e par une moins bonne, puisque l’annĂ©e suivante le goitre que j’avais contractĂ© pendant mon enfance, et qui s’était fait oublier, revient de plus belle.

Entre-temps et les annĂ©es qui suivirent, j’ai vite compris que la seule valeur sĂ»re pour l’investissement, ce sont les territoires. Bien sĂ»r de grosses mises sont requises, mais cela en a toujours valu la peine tout le long de la partie, me permettant de m’enrichir pour peu Ă  peu quitter ma condition initiale. Plus tard, ma femme tombera malade et aprĂšs un nouveau dĂ©mĂ©nagement, je pars de l’armĂ©e pour me faire engager comme vendeur. Et c’est lorsque l’on a enfin un vrai travail que le jeu nous permet de faire quelque chose de gĂ©nial : harceler notre patron pour une augmentation. Deux ans plus tard, Ă  vingt six ans, ma femme tombe enceinte et mon premier fils naĂźt, un petit garçon que je nomme amoureusement Ittiporn.

L’annĂ©e suivante fut dĂ©cisive. Le jeu m’informe qu’une guerre civile vient d’ĂȘtre dĂ©clarĂ©e en Chine et, craignant pour ma peau, je pars pour Bombay en Inde, un pays qui me promet plus de richesses et une meilleure condition. À trente ans la paix est rĂ©tablie. Entre-temps ma femme est devenue voleuse de biens mineurs alors que moi ai continuĂ© ma carriĂšre de vendeur me rapportant nombre de roupies. Et c’est l’annĂ©e suivante que les rĂ©jouissances commencent et qu’on dĂ©couvre l’envers du dĂ©cors. Ma maison est vandalisĂ©e, et une inondation majeure touche l’Inde faisait 1853 morts et 26 000 000 de blessĂ©s — une inondation Ă  laquelle j’échappe miraculeusement. Cette mĂȘme annĂ©e mon fils a un accident de voiture duquel il ressort sans lĂ©sions graves.

Puis passĂšrent les annĂ©es, un dĂ©mĂ©nagement, une promotion ; et la naissance d’une fille Abha qui mourra l’annĂ©e suivante d’une infection respiratoire. Suivie de ma mĂšre, d’une attaque. Cette chĂšre mĂšre qui me lĂšgue la belle somme de 50 000 roupies. C’est Ă  trente-six ans que je quitte mon mĂ©tier de vendeur pour celui de “forman” (je sais mĂȘme pas ce que c’est mais ça payait bien). Il faut savoir que le jeu sĂ©lectionne les mĂ©tiers disponibles selon mes qualifications, celles-ci dĂ©pendant de mes Ă©tudes et de mon expĂ©rience.

À quarante ans j’adopte Roshan, ma deuxiĂšme fille, alors que Ittiporn entre dans une Ă©cole de commerce dans laquelle il sautera mĂȘme une annĂ©e FFS. D’ailleurs cinq ans plus tard il dĂ©mĂ©nagera loin de moi. À ce stade-lĂ  du jeu j’étais plutĂŽt fier de ma partie, parce que je m’étais quand mĂȘme bien sorti de la merde. J’avais assez de fric pour assurer une qualitĂ© de vie juste un brin de la moyenne, ce qui me suffisait amplement au vu de mon point de dĂ©part. Et lĂ , je rĂ©alise mon rĂȘve, stupide mais mon rĂȘve : la cinquantaine fraĂźchement passĂ©e, je dĂ©mĂ©nage Ă  Toulon, dans le sud de la France (yay). Cependant, c’est suite Ă  deux cambriolages et au divorce avec ma femme (qui entre-temps Ă©tait devenue une sale droguĂ©e ne ramenant rien Ă  la maison) que se dĂ©cide un dĂ©mĂ©nagement dans une zone un peu plus tranquille, prĂšs de Belfort. C’est mĂȘme lĂ  que j’ai remarquĂ© que le jeu Ă©tablissait les conditions de vie dans les pays selon des statistiques et des donnĂ©es, sur des Ă©chelles de 1 Ă  7 oĂč 7 est le pire. Ainsi par exemple, la France dans “Droits civiques” et “Droits Politiques” avait 1, alors que non loin “Corruption” affichait 3, ah ha.

À cinquante six ans, divorcĂ©, je pars Ă  la quĂȘte d’un nouvel amour. Seulement, les filles se suivent, et aprĂšs six rĂąteaux, je m’engage yeux fermĂ©s avec Marie-JosĂ©e (oui, yikes) et lui promet le mariage, ce qui se rĂ©alise l’annĂ©e suivante. Pendant ce temps, ma deuxiĂšme fille Roshan se marie avec Jean-Paul Gillette (hqhq) et ils ont ensemble une fille, RenĂ©e
 je sais pas dans quelle banque de prĂ©noms ils ont pĂȘchĂ©, mais je pense qu’on a quand mĂȘme un beau paquet de trucs infĂąmes Ă  porter.

À soixante-neuf ans, aprĂšs avoir quittĂ© le travail de foreman (trop vieux) puis celui de vendeur, j’arrĂȘte le travail et dĂ©mĂ©nage en PolynĂ©sie Française, Ă  Papeete. Ma retraite m’indique que j’ai assez pour vivre jusqu’à 115 ans
 ce que malheureusement mon Ă©tat de santĂ©, mon goitre et la maladie que j’ai attrapĂ©e en Inde, contredisent. Six ans plus tard, une tempĂȘte tropicale majeure frappe l’üle, ma zone en particulier, et on me demande 19000000 CFP d’investissement, que je donne en voyant la moitiĂ© de mes Ă©conomies partir.

Une tristesse de courte durĂ©e, puisque peu d’annĂ©es plus tard aprĂšs une fin de vie difficile (cambriolage, et la mort de ma femme d’un cancer du sein, Ă  ses soixante-dix-neuf ans) je m’éteins en silence, Ă  quatre-vingt-un ans, d’une infection.

Une vie bien remplie donc, que j’ai passĂ© Ă  tout faire pour me sortir de lĂ  oĂč j’étais Ă  la base. Au final je suis content d’avoir tenu 81 ans et d’avoir pu ĂȘtre ce que je redoutais ne jamais ĂȘtre avec un dĂ©part de partie si dĂ©courageant.


Judith Robertson habite Des Moines, dans l’Iowa. De jeunes parents Irene (18 ans) et William (24 ans). Ma seule soeur est Judy, nĂ©e un an avant moi.

Et lĂ , c’est la partie dite “rigolade”. Celle oĂč on enchaĂźne les annĂ©es le sourire au lĂšvre. Mon seul choix a Ă©tĂ© Ă  six ans, celui de voler le jouet d’un autre. À treize ans, devant mes rĂ©sultats excellents, je saute une annĂ©e et rencontre dans ma nouvelle classe Wayne Stevens. Une rencontre que mes parents dĂ©sapprouvent complĂštement, et sous leur pression je romps avec lui (salauds). J’avoue ne pas avoir beaucoup de problĂšme avec les mecs dans mes premiĂšres annĂ©es, et j’en vois dĂ©filer beaucoup. Mes Ă©tudes passent sans souci, j’évite l’alcool quand demandĂ©, et mĂȘme si mon petit ami est envoyĂ© en “academic probation” j’en trouve un autre sous peu.

Bref, je me la coule douce, jusqu’au jour de mes 22 ans oĂč la nouvelle tombe : je suis stĂ©rile
 bordel. Alors je me rĂ©fugie dans l’argent, y a pas de raison. À 23 ans je deviens Technicienne d’Industrie avec une paye d’environ 5000$ par mois. Une paye qui ne cessera d’augmenter tout au long de la partie sous la pression de mes demandes d’augmentation.

À 28 ans je dĂ©mĂ©nage Ă  Los Angeles pour craner avec mon fric. Et le jeu a beau m’informer que mon pays est impliquĂ© dans une guerre et que des soldats sont tuĂ©s, ’nafout. Ma mĂšre sort de dĂ©pression, ce genre de trucs. Trop la joie. Sauf cĂŽtĂ© mecs. Parce qu’il faut pas se leurrer, comme je suis pas fertile, bizarrement les trois quarts des mecs de mon Ăąge me rejettent aprĂšs un an. Ainsi j’en voit passer des dizaines, dont notamment Douglas Nichols avec qui j’ai adoptĂ© la petite Anna. Un mari aimant donc, qui avec ma chance, mourra d’un cancer de l’estomac peu aprĂšs. Anecdote drĂŽle : j’ai Ă  un moment Ă©tĂ© rejetĂ© par “Daniel Gilbertte” \o/ En fait, en vue de l’échec de ma vie de famille, j’ai quittĂ© mon travail pour devenir Inspectrice, un travail qui rapportait Ă  la fin de ma partie une belle somme de plus de 16 000$ par mois. Ouais, en fait, j’ai tout axĂ© sur le fric et ça m’a bien rĂ©ussi. À la fin de ma partie, j’avais la plus belle maison, je mangeais trois fois plus qu’à ma faim, achetais les yeux fermĂ©s, et je trouvais mĂȘme le temps d’en donner un peu Ă  ces sales pauvres. À partir de ce point, plus rien ne peut vous dĂ©ranger, on m’a volĂ© deux fois l’une de mes quatre voitures, mes parents sont dĂ©cĂ©dĂ©s de vieillesse, ma fille fume, et j’en passe.

Pendant que mon assiette et mon compte en banque se remplissent, j’enchaĂźne mariage sur mariage, et divorce sur divorce; chaque Ă©tape ne durant jamais plus d’un an tant je devais ĂȘtre repoussante Ă  ce moment du jeu.

Et soudainement le jeu m’achĂšve. Alors qu’avec mon personnage nĂ© de rien j’ai vĂ©cu une longue vie intĂ©ressante, CETTE SALLE POURRIE GÂTÉE DE JUDITH MEURT DU DIABÈTE À 63 ANS.

“MAIS C’EST QUOI CE JEU§§”.


Bref, vous l’aurez compris, Real Lives est un jeu trĂšs ouvert et pour lequel les rĂ©cits de partie sont souvent intĂ©ressants Ă  lire et Ă  vivre. Ainsi j’ai eu et vu des parties comme policier corrompus au Quebec vivant avec leur tranquille famille, de personnes nĂ©es de clochards et se prostituant pour vivre, d’éthiopiens devenus sportifs de haut niveau, et mĂȘme une partie que j’ai lancĂ©e et ai perdu une annĂ©e plus tard suite Ă  une malformation natale.

Alors mĂȘme si l’interface repousse un peu au dĂ©but, j’ai trouvĂ© quelque chose dans ce programme qui le rend intĂ©ressant et ce Ă  chaque partie. On ressent tout de mĂȘme une vraie envie des personnes Ă  l’origine de vous faire prendre conscience des conditions de vie dans d’autres pays, de la difficultĂ© parfois insurmontable Ă  se sortir de sa condition de vie d’origine ; cette idĂ©e de nous faire penser Ă  “Et si j’étais pas nĂ© en France”.

Si la curiositĂ© vous pique, ça se tĂ©lĂ©charge par lĂ  : http://www.educationalsimulations.com/eval.php Remplissez le formulaire Ă  l’arrache et faites OK.

Six screenshots moisis pris pendant ma partie avec Judith (certains uploadent encore) : http://the8day.info/Articles/RL01.jpg http://the8day.info/Articles/RL02.jpg http://the8day.info/Articles/RL03.jpg http://the8day.info/Articles/RL04.jpg http://the8day.info/Articles/RL05.jpg http://the8day.info/Articles/RL06.jpg

Et un screenshot des possibilitĂ©s et options du jeu lui-mĂȘme : http://the8day.info/Articles/RL07.PNG

Sur ce.

P.S : J’ai pas relu et je suis fatiguĂ©. S’il y a des fautes, je m’en fous. Merci de votre attention.

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