Autopergamene
Real Lives
articleđ«đ· françaisPublished 2007-07-19GamingReview10mn to read
Il est tout naturel de vouloir vivre la vie dâun autre. Partant de ce principe, Real Lives vous propose Ă travers un jeu de vous mettre le temps dâune vie dans la peau de quelquâun dâautre. âŠĂtant assez complexe de dĂ©crire le âjeuâ, voici comme Ă lâaccoutumĂ©e un rĂ©cit de partie. Avec moins de screenshots que dâhabitude, du fait de la relativement pauvre interface du jeu.
Je prĂ©cise avant quoi que ce soit que pour donner un Ă©ventail assez large du jeu, deux parties seront dĂ©crites. Lâune dans la peau dâun petit garçon nĂ© dans une rĂ©gion dite âen dĂ©veloppementâ, en Birmanie, dans une famille nombreuse â bref, pas gĂątĂ© par la nature. Lâautre, dans lâIowa aux Ătats Unis, dans la peau dâune petite fille AmĂ©ricaine de famille dans la moyenne si ce nâest lĂ©gĂšrement au-dessus. Chacun a ses propres caractĂ©ristiques (Intelligence, dons artistiques, force, une jauge de conscience variant selon vos actes, etc) dĂ©pendant des parents et du hasard. Ils influent sur votre destin dans le jeu.
Le récit de partie suivra le chronologie de ma partie, se déroulant année aprÚs année.
- â Je mâappelle Totsakan Tomson ; nĂ© en Birmanie du centre-ouest Ă Sagaing. Jâai une mĂšre nommĂ©e Tuptim (27 ans) et un pĂšre, Pairat (30 ans). Jâai aussi trois frĂšres et trois soeurs dont je me suis si peu prĂ©occupĂ© durant ma partie que leur noms ne seront mĂȘme presque pas Ă©voquĂ©s ailleurs que dans ce paragraphe; leurs noms sont pĂȘle-mĂȘle Pramoj, Lap, Lek, Tui, Kovit et Prang.
Un an aprĂšs ma naissance, mon quatriĂšme frĂšre Ditaka vient au monde; et lâannĂ©e suivante la paix est signĂ©e dans mon pays. Le jeu ne commençant que vers 6/8 ans Ă vous laisser les commandes, jâai assistĂ© toute mon enfance Ă de joyeux Ă©vĂšnements, dont je retiendrai notamment les six maladies de mon pĂšre, la mienne, les deux de ma mĂšre, et la mort dâun de mes frĂšres. En gĂ©nĂ©ral, Ă ce stade-lĂ , on se dit âWTFâ tant le jeu semble vous pourrir sans vous laisser faire quoi que ce soit.
Ă six ans jâentre Ă lâĂ©cole, et il faut alors choisir mes loisirs. Nâayant pas envie de moisir comme une merde dans ce jeu, je mise tout sur ce qui pourrait me sortir de lĂ . Je dĂ©coche âJouerâ et coche âLire/Ătudierâ. Je coche lâentraĂźnement physique, et le sport. Je me dis quâĂ ce stade là ça peut pas faire de mal. Les activitĂ©s fonctionnent de maniĂšre assez Ă©trange dans Real Lives ; de temps en temps le jeu vous en laisse choisir une supplĂ©mentaire, vous laissant au fil du temps jongler avec de plus en plus dâactivitĂ©s. Cependant en cas de dĂ©mĂ©nagement par exemple, vous devrez repartir du quota de base avant dâĂ nouveau vous constituer un emploi du temps organisĂ© vous laissant ajouter une activitĂ©, etc.
Toute mon enfance se passe Ă travers les Ă©vĂšnements qui touchent ma famille, dont le dĂ©part prĂ©cipitĂ© de plusieurs de mes proches (au sens propre, ils sont pas morts, juste partis de leur propre chef pour travailler, parfois trĂšs jeunes) ; ou encore les batailles rangĂ©es qui ont lieu rĂ©guliĂšrement. Jusque mes douze ans, jâai pu choisir nombre de nouvelles activitĂ©s, dont lâĂ©tude politique et lâart (que jâai plus tard abandonnĂ©). Et câest cette mĂȘme annĂ©e de mes douze ans que le jeu mâannonce comme si de rien nâĂ©tait âI became a woman this year after the ceremony of nahtwin.â. âŠok, si tu veux copain. Pourtant, bien quâĂ©tant censĂ© ĂȘtre une femme, lâannĂ©e suivante Ă treize ans je rencontre Achara, et pour la garder elle et mon avenir, lâannĂ©e suivante je dĂ©cide dâesquiver le tabac pour ne pas me moisir mon avenir. Et lĂ câest le drame. Alors quâĂ seize ans je participe Ă des âefforts humanitairesâ bĂ©nĂ©volement, mon destin prend un virage serrĂ©. Du fait de mes âactivitĂ©s politiquesâ je suis renvoyĂ© de mon Ă©cole comme un paria, et envoyĂ© Ă lâarmĂ©e. JOIE §
Câest une fois quittĂ© le domicile familial que le jeu commence vraiment. Effectivement, tout dâun coup on est envahi par les choses Ă gĂ©rer. Entre autres le budget mensuel et le compte en banque. Tout content de ma premiĂšre paye, je place mes 200k sur un compte en banque en attendant les intĂ©rĂȘts. Deux ans plus tard⊠jâai pas bougĂ©. Ayant vite compris que lâarmĂ©e mâavait pris sous son aile, jâavais dĂ©cidĂ© dây rester et de profiter sagement de la paye. Et ainsi deux ans plus tard, et grĂące Ă lâargent gagnĂ©, moi et Achara me marions lâannĂ©e de mes dix-huit ans. Câest cette annĂ©e que jâai dĂ©cidĂ© dâun peu faire quelque chose de mon argent, en investissant ça et lĂ et en voyant ce qui rapporte vraiment.
LâannĂ©e suivante, le jeu mâinforme que le gouvernement dĂ©cide de dĂ©sormais faire des arrestations alĂ©atoires de personnes pour des interrogatoires trĂšs sĂ©vĂšres ; et bien Ă©videmment, Ă dix-neuf ans je me fais arrĂȘter et interroger. Ayant jurĂ© Ă mon pote qui suivait la partie que je perdrai pas comme une merde juste parce que le jeu ne mâavait pas gĂątĂ©, je balance tous ceux quâil faut. Peu importe si tous ceux avec qui je traĂźnais pour mes activitĂ©s passĂ©es doivent en crever, je comptais pas perdre. Contents de ma collaboration (ouais je suis un connard, et alors) les autoritĂ©s me relĂąchent. Cette mĂȘme annĂ©e, le mariage sâĂ©tant bien passĂ© comme prĂ©vu, je quitte cette ville de merde pour Magwe, non loin. Une bonne nouvelle contrastĂ©e par une moins bonne, puisque lâannĂ©e suivante le goitre que jâavais contractĂ© pendant mon enfance, et qui sâĂ©tait fait oublier, revient de plus belle.
Entre-temps et les annĂ©es qui suivirent, jâai vite compris que la seule valeur sĂ»re pour lâinvestissement, ce sont les territoires. Bien sĂ»r de grosses mises sont requises, mais cela en a toujours valu la peine tout le long de la partie, me permettant de mâenrichir pour peu Ă peu quitter ma condition initiale. Plus tard, ma femme tombera malade et aprĂšs un nouveau dĂ©mĂ©nagement, je pars de lâarmĂ©e pour me faire engager comme vendeur. Et câest lorsque lâon a enfin un vrai travail que le jeu nous permet de faire quelque chose de gĂ©nial : harceler notre patron pour une augmentation. Deux ans plus tard, Ă vingt six ans, ma femme tombe enceinte et mon premier fils naĂźt, un petit garçon que je nomme amoureusement Ittiporn.
LâannĂ©e suivante fut dĂ©cisive. Le jeu mâinforme quâune guerre civile vient dâĂȘtre dĂ©clarĂ©e en Chine et, craignant pour ma peau, je pars pour Bombay en Inde, un pays qui me promet plus de richesses et une meilleure condition. Ă trente ans la paix est rĂ©tablie. Entre-temps ma femme est devenue voleuse de biens mineurs alors que moi ai continuĂ© ma carriĂšre de vendeur me rapportant nombre de roupies. Et câest lâannĂ©e suivante que les rĂ©jouissances commencent et quâon dĂ©couvre lâenvers du dĂ©cors. Ma maison est vandalisĂ©e, et une inondation majeure touche lâInde faisait 1853 morts et 26 000 000 de blessĂ©s â une inondation Ă laquelle jâĂ©chappe miraculeusement. Cette mĂȘme annĂ©e mon fils a un accident de voiture duquel il ressort sans lĂ©sions graves.
Puis passĂšrent les annĂ©es, un dĂ©mĂ©nagement, une promotion ; et la naissance dâune fille Abha qui mourra lâannĂ©e suivante dâune infection respiratoire. Suivie de ma mĂšre, dâune attaque. Cette chĂšre mĂšre qui me lĂšgue la belle somme de 50 000 roupies. Câest Ă trente-six ans que je quitte mon mĂ©tier de vendeur pour celui de âformanâ (je sais mĂȘme pas ce que câest mais ça payait bien). Il faut savoir que le jeu sĂ©lectionne les mĂ©tiers disponibles selon mes qualifications, celles-ci dĂ©pendant de mes Ă©tudes et de mon expĂ©rience.
Ă quarante ans jâadopte Roshan, ma deuxiĂšme fille, alors que Ittiporn entre dans une Ă©cole de commerce dans laquelle il sautera mĂȘme une annĂ©e FFS. Dâailleurs cinq ans plus tard il dĂ©mĂ©nagera loin de moi. Ă ce stade-lĂ du jeu jâĂ©tais plutĂŽt fier de ma partie, parce que je mâĂ©tais quand mĂȘme bien sorti de la merde. Jâavais assez de fric pour assurer une qualitĂ© de vie juste un brin de la moyenne, ce qui me suffisait amplement au vu de mon point de dĂ©part. Et lĂ , je rĂ©alise mon rĂȘve, stupide mais mon rĂȘve : la cinquantaine fraĂźchement passĂ©e, je dĂ©mĂ©nage Ă Toulon, dans le sud de la France (yay). Cependant, câest suite Ă deux cambriolages et au divorce avec ma femme (qui entre-temps Ă©tait devenue une sale droguĂ©e ne ramenant rien Ă la maison) que se dĂ©cide un dĂ©mĂ©nagement dans une zone un peu plus tranquille, prĂšs de Belfort. Câest mĂȘme lĂ que jâai remarquĂ© que le jeu Ă©tablissait les conditions de vie dans les pays selon des statistiques et des donnĂ©es, sur des Ă©chelles de 1 Ă 7 oĂč 7 est le pire. Ainsi par exemple, la France dans âDroits civiquesâ et âDroits Politiquesâ avait 1, alors que non loin âCorruptionâ affichait 3, ah ha.
Ă cinquante six ans, divorcĂ©, je pars Ă la quĂȘte dâun nouvel amour. Seulement, les filles se suivent, et aprĂšs six rĂąteaux, je mâengage yeux fermĂ©s avec Marie-JosĂ©e (oui, yikes) et lui promet le mariage, ce qui se rĂ©alise lâannĂ©e suivante. Pendant ce temps, ma deuxiĂšme fille Roshan se marie avec Jean-Paul Gillette (hqhq) et ils ont ensemble une fille, RenĂ©e⊠je sais pas dans quelle banque de prĂ©noms ils ont pĂȘchĂ©, mais je pense quâon a quand mĂȘme un beau paquet de trucs infĂąmes Ă porter.
Ă soixante-neuf ans, aprĂšs avoir quittĂ© le travail de foreman (trop vieux) puis celui de vendeur, jâarrĂȘte le travail et dĂ©mĂ©nage en PolynĂ©sie Française, Ă Papeete. Ma retraite mâindique que jâai assez pour vivre jusquâĂ 115 ans⊠ce que malheureusement mon Ă©tat de santĂ©, mon goitre et la maladie que jâai attrapĂ©e en Inde, contredisent. Six ans plus tard, une tempĂȘte tropicale majeure frappe lâĂźle, ma zone en particulier, et on me demande 19000000 CFP dâinvestissement, que je donne en voyant la moitiĂ© de mes Ă©conomies partir.
Une tristesse de courte durĂ©e, puisque peu dâannĂ©es plus tard aprĂšs une fin de vie difficile (cambriolage, et la mort de ma femme dâun cancer du sein, Ă ses soixante-dix-neuf ans) je mâĂ©teins en silence, Ă quatre-vingt-un ans, dâune infection.
Une vie bien remplie donc, que jâai passĂ© Ă tout faire pour me sortir de lĂ oĂč jâĂ©tais Ă la base. Au final je suis content dâavoir tenu 81 ans et dâavoir pu ĂȘtre ce que je redoutais ne jamais ĂȘtre avec un dĂ©part de partie si dĂ©courageant.
Judith Robertson habite Des Moines, dans lâIowa. De jeunes parents Irene (18 ans) et William (24 ans). Ma seule soeur est Judy, nĂ©e un an avant moi.
Et lĂ , câest la partie dite ârigoladeâ. Celle oĂč on enchaĂźne les annĂ©es le sourire au lĂšvre. Mon seul choix a Ă©tĂ© Ă six ans, celui de voler le jouet dâun autre. Ă treize ans, devant mes rĂ©sultats excellents, je saute une annĂ©e et rencontre dans ma nouvelle classe Wayne Stevens. Une rencontre que mes parents dĂ©sapprouvent complĂštement, et sous leur pression je romps avec lui (salauds). Jâavoue ne pas avoir beaucoup de problĂšme avec les mecs dans mes premiĂšres annĂ©es, et jâen vois dĂ©filer beaucoup. Mes Ă©tudes passent sans souci, jâĂ©vite lâalcool quand demandĂ©, et mĂȘme si mon petit ami est envoyĂ© en âacademic probationâ jâen trouve un autre sous peu.
Bref, je me la coule douce, jusquâau jour de mes 22 ans oĂč la nouvelle tombe : je suis stĂ©rile⊠bordel. Alors je me rĂ©fugie dans lâargent, y a pas de raison. Ă 23 ans je deviens Technicienne dâIndustrie avec une paye dâenviron 5000$ par mois. Une paye qui ne cessera dâaugmenter tout au long de la partie sous la pression de mes demandes dâaugmentation.
Ă 28 ans je dĂ©mĂ©nage Ă Los Angeles pour craner avec mon fric. Et le jeu a beau mâinformer que mon pays est impliquĂ© dans une guerre et que des soldats sont tuĂ©s, ânafout. Ma mĂšre sort de dĂ©pression, ce genre de trucs. Trop la joie. Sauf cĂŽtĂ© mecs. Parce quâil faut pas se leurrer, comme je suis pas fertile, bizarrement les trois quarts des mecs de mon Ăąge me rejettent aprĂšs un an. Ainsi jâen voit passer des dizaines, dont notamment Douglas Nichols avec qui jâai adoptĂ© la petite Anna. Un mari aimant donc, qui avec ma chance, mourra dâun cancer de lâestomac peu aprĂšs. Anecdote drĂŽle : jâai Ă un moment Ă©tĂ© rejetĂ© par âDaniel Gilbertteâ \o/ En fait, en vue de lâĂ©chec de ma vie de famille, jâai quittĂ© mon travail pour devenir Inspectrice, un travail qui rapportait Ă la fin de ma partie une belle somme de plus de 16 000$ par mois. Ouais, en fait, jâai tout axĂ© sur le fric et ça mâa bien rĂ©ussi. Ă la fin de ma partie, jâavais la plus belle maison, je mangeais trois fois plus quâĂ ma faim, achetais les yeux fermĂ©s, et je trouvais mĂȘme le temps dâen donner un peu Ă ces sales pauvres. Ă partir de ce point, plus rien ne peut vous dĂ©ranger, on mâa volĂ© deux fois lâune de mes quatre voitures, mes parents sont dĂ©cĂ©dĂ©s de vieillesse, ma fille fume, et jâen passe.
Pendant que mon assiette et mon compte en banque se remplissent, jâenchaĂźne mariage sur mariage, et divorce sur divorce; chaque Ă©tape ne durant jamais plus dâun an tant je devais ĂȘtre repoussante Ă ce moment du jeu.
Et soudainement le jeu mâachĂšve. Alors quâavec mon personnage nĂ© de rien jâai vĂ©cu une longue vie intĂ©ressante, CETTE SALLE POURRIE GĂTĂE DE JUDITH MEURT DU DIABĂTE Ă 63 ANS.
âMAIS CâEST QUOI CE JEU§§â.
Bref, vous lâaurez compris, Real Lives est un jeu trĂšs ouvert et pour lequel les rĂ©cits de partie sont souvent intĂ©ressants Ă lire et Ă vivre. Ainsi jâai eu et vu des parties comme policier corrompus au Quebec vivant avec leur tranquille famille, de personnes nĂ©es de clochards et se prostituant pour vivre, dâĂ©thiopiens devenus sportifs de haut niveau, et mĂȘme une partie que jâai lancĂ©e et ai perdu une annĂ©e plus tard suite Ă une malformation natale.
Alors mĂȘme si lâinterface repousse un peu au dĂ©but, jâai trouvĂ© quelque chose dans ce programme qui le rend intĂ©ressant et ce Ă chaque partie. On ressent tout de mĂȘme une vraie envie des personnes Ă lâorigine de vous faire prendre conscience des conditions de vie dans dâautres pays, de la difficultĂ© parfois insurmontable Ă se sortir de sa condition de vie dâorigine ; cette idĂ©e de nous faire penser Ă âEt si jâĂ©tais pas nĂ© en Franceâ.
Si la curiositĂ© vous pique, ça se tĂ©lĂ©charge par lĂ : http://www.educationalsimulations.com/eval.php Remplissez le formulaire Ă lâarrache et faites OK.
Six screenshots moisis pris pendant ma partie avec Judith (certains uploadent encore) : http://the8day.info/Articles/RL01.jpg http://the8day.info/Articles/RL02.jpg http://the8day.info/Articles/RL03.jpg http://the8day.info/Articles/RL04.jpg http://the8day.info/Articles/RL05.jpg http://the8day.info/Articles/RL06.jpg
Et un screenshot des possibilitĂ©s et options du jeu lui-mĂȘme : http://the8day.info/Articles/RL07.PNG
Sur ce.
P.S : Jâai pas relu et je suis fatiguĂ©. Sâil y a des fautes, je mâen fous. Merci de votre attention.