The Winter Throat

Real Lives

article🇫🇷 françaisPublished July 2007 (at 17)#gaming#review2626 words9 mn to read
Real Lives

Il est tout naturel de vouloir vivre la vie d’un autre. Partant de ce principe, Real Lives vous propose à travers un jeu de vous mettre le temps d’une vie dans la peau de quelqu’un d’autre. …Étant assez complexe de décrire le “jeu”, voici comme à l’accoutumée un récit de partie. Avec moins de screenshots que d’habitude, du fait de la relativement pauvre interface du jeu.

Je précise avant quoi que ce soit que pour donner un éventail assez large du jeu, deux parties seront décrites. L’une dans la peau d’un petit garçon né dans une région dite “en développement”, en Birmanie, dans une famille nombreuse — bref, pas gâté par la nature. L’autre, dans l’Iowa aux États Unis, dans la peau d’une petite fille Américaine de famille dans la moyenne si ce n’est légèrement au-dessus. Chacun a ses propres caractéristiques (Intelligence, dons artistiques, force, une jauge de conscience variant selon vos actes, etc) dépendant des parents et du hasard. Ils influent sur votre destin dans le jeu.

Le récit de partie suivra le chronologie de ma partie, se déroulant année après année.


Je m’appelle Totsakan Tomson ; né en Birmanie du centre-ouest à Sagaing. J’ai une mère nommée Tuptim (27 ans) et un père, Pairat (30 ans). J’ai aussi trois frères et trois soeurs dont je me suis si peu préoccupé durant ma partie que leur noms ne seront même presque pas évoqués ailleurs que dans ce paragraphe; leurs noms sont pêle-mêle Pramoj, Lap, Lek, Tui, Kovit et Prang.

Un an après ma naissance, mon quatrième frère Ditaka vient au monde; et l’année suivante la paix est signée dans mon pays. Le jeu ne commençant que vers 6/8 ans à vous laisser les commandes, j’ai assisté toute mon enfance à de joyeux évènements, dont je retiendrai notamment les six maladies de mon père, la mienne, les deux de ma mère, et la mort d’un de mes frères. En général, à ce stade-là, on se dit “WTF” tant le jeu semble vous pourrir sans vous laisser faire quoi que ce soit.

À six ans j’entre à l’école, et il faut alors choisir mes loisirs. N’ayant pas envie de moisir comme une merde dans ce jeu, je mise tout sur ce qui pourrait me sortir de là. Je décoche “Jouer” et coche “Lire/Étudier”. Je coche l’entraînement physique, et le sport. Je me dis qu’à ce stade là ça peut pas faire de mal. Les activités fonctionnent de manière assez étrange dans Real Lives ; de temps en temps le jeu vous en laisse choisir une supplémentaire, vous laissant au fil du temps jongler avec de plus en plus d’activités. Cependant en cas de déménagement par exemple, vous devrez repartir du quota de base avant d’à nouveau vous constituer un emploi du temps organisé vous laissant ajouter une activité, etc.

Toute mon enfance se passe à travers les évènements qui touchent ma famille, dont le départ précipité de plusieurs de mes proches (au sens propre, ils sont pas morts, juste partis de leur propre chef pour travailler, parfois très jeunes) ; ou encore les batailles rangées qui ont lieu régulièrement. Jusque mes douze ans, j’ai pu choisir nombre de nouvelles activités, dont l’étude politique et l’art (que j’ai plus tard abandonné). Et c’est cette même année de mes douze ans que le jeu m’annonce comme si de rien n’était “I became a woman this year after the ceremony of nahtwin.”. …ok, si tu veux copain. Pourtant, bien qu’étant censé être une femme, l’année suivante à treize ans je rencontre Achara, et pour la garder elle et mon avenir, l’année suivante je décide d’esquiver le tabac pour ne pas me moisir mon avenir. Et là c’est le drame. Alors qu’à seize ans je participe à des “efforts humanitaires” bénévolement, mon destin prend un virage serré. Du fait de mes “activités politiques” je suis renvoyé de mon école comme un paria, et envoyé à l’armée. JOIE §

C’est une fois quitté le domicile familial que le jeu commence vraiment. Effectivement, tout d’un coup on est envahi par les choses à gérer. Entre autres le budget mensuel et le compte en banque. Tout content de ma première paye, je place mes 200k sur un compte en banque en attendant les intérêts. Deux ans plus tard… j’ai pas bougé. Ayant vite compris que l’armée m’avait pris sous son aile, j’avais décidé d’y rester et de profiter sagement de la paye. Et ainsi deux ans plus tard, et grâce à l’argent gagné, moi et Achara me marions l’année de mes dix-huit ans. C’est cette année que j’ai décidé d’un peu faire quelque chose de mon argent, en investissant ça et là et en voyant ce qui rapporte vraiment.

L’année suivante, le jeu m’informe que le gouvernement décide de désormais faire des arrestations aléatoires de personnes pour des interrogatoires très sévères ; et bien évidemment, à dix-neuf ans je me fais arrêter et interroger. Ayant juré à mon pote qui suivait la partie que je perdrai pas comme une merde juste parce que le jeu ne m’avait pas gâté, je balance tous ceux qu’il faut. Peu importe si tous ceux avec qui je traînais pour mes activités passées doivent en crever, je comptais pas perdre. Contents de ma collaboration (ouais je suis un connard, et alors) les autorités me relâchent. Cette même année, le mariage s’étant bien passé comme prévu, je quitte cette ville de merde pour Magwe, non loin. Une bonne nouvelle contrastée par une moins bonne, puisque l’année suivante le goitre que j’avais contracté pendant mon enfance, et qui s’était fait oublier, revient de plus belle.

Entre-temps et les années qui suivirent, j’ai vite compris que la seule valeur sûre pour l’investissement, ce sont les territoires. Bien sûr de grosses mises sont requises, mais cela en a toujours valu la peine tout le long de la partie, me permettant de m’enrichir pour peu à peu quitter ma condition initiale. Plus tard, ma femme tombera malade et après un nouveau déménagement, je pars de l’armée pour me faire engager comme vendeur. Et c’est lorsque l’on a enfin un vrai travail que le jeu nous permet de faire quelque chose de génial : harceler notre patron pour une augmentation. Deux ans plus tard, à vingt six ans, ma femme tombe enceinte et mon premier fils naît, un petit garçon que je nomme amoureusement Ittiporn.

L’année suivante fut décisive. Le jeu m’informe qu’une guerre civile vient d’être déclarée en Chine et, craignant pour ma peau, je pars pour Bombay en Inde, un pays qui me promet plus de richesses et une meilleure condition. À trente ans la paix est rétablie. Entre-temps ma femme est devenue voleuse de biens mineurs alors que moi ai continué ma carrière de vendeur me rapportant nombre de roupies. Et c’est l’année suivante que les réjouissances commencent et qu’on découvre l’envers du décors. Ma maison est vandalisée, et une inondation majeure touche l’Inde faisait 1853 morts et 26 000 000 de blessés — une inondation à laquelle j’échappe miraculeusement. Cette même année mon fils a un accident de voiture duquel il ressort sans lésions graves.

Puis passèrent les années, un déménagement, une promotion ; et la naissance d’une fille Abha qui mourra l’année suivante d’une infection respiratoire. Suivie de ma mère, d’une attaque. Cette chère mère qui me lègue la belle somme de 50 000 roupies. C’est à trente-six ans que je quitte mon métier de vendeur pour celui de “forman” (je sais même pas ce que c’est mais ça payait bien). Il faut savoir que le jeu sélectionne les métiers disponibles selon mes qualifications, celles-ci dépendant de mes études et de mon expérience.

À quarante ans j’adopte Roshan, ma deuxième fille, alors que Ittiporn entre dans une école de commerce dans laquelle il sautera même une année FFS. D’ailleurs cinq ans plus tard il déménagera loin de moi. À ce stade-là du jeu j’étais plutôt fier de ma partie, parce que je m’étais quand même bien sorti de la merde. J’avais assez de fric pour assurer une qualité de vie juste un brin de la moyenne, ce qui me suffisait amplement au vu de mon point de départ. Et là, je réalise mon rêve, stupide mais mon rêve : la cinquantaine fraîchement passée, je déménage à Toulon, dans le sud de la France (yay). Cependant, c’est suite à deux cambriolages et au divorce avec ma femme (qui entre-temps était devenue une sale droguée ne ramenant rien à la maison) que se décide un déménagement dans une zone un peu plus tranquille, près de Belfort. C’est même là que j’ai remarqué que le jeu établissait les conditions de vie dans les pays selon des statistiques et des données, sur des échelles de 1 à 7 où 7 est le pire. Ainsi par exemple, la France dans “Droits civiques” et “Droits Politiques” avait 1, alors que non loin “Corruption” affichait 3, ah ha.

À cinquante six ans, divorcé, je pars à la quête d’un nouvel amour. Seulement, les filles se suivent, et après six râteaux, je m’engage yeux fermés avec Marie-Josée (oui, yikes) et lui promet le mariage, ce qui se réalise l’année suivante. Pendant ce temps, ma deuxième fille Roshan se marie avec Jean-Paul Gillette (hqhq) et ils ont ensemble une fille, Renée… je sais pas dans quelle banque de prénoms ils ont pêché, mais je pense qu’on a quand même un beau paquet de trucs infâmes à porter.

À soixante-neuf ans, après avoir quitté le travail de foreman (trop vieux) puis celui de vendeur, j’arrête le travail et déménage en Polynésie Française, à Papeete. Ma retraite m’indique que j’ai assez pour vivre jusqu’à 115 ans… ce que malheureusement mon état de santé, mon goitre et la maladie que j’ai attrapée en Inde, contredisent. Six ans plus tard, une tempête tropicale majeure frappe l’île, ma zone en particulier, et on me demande 19000000 CFP d’investissement, que je donne en voyant la moitié de mes économies partir.

Une tristesse de courte durée, puisque peu d’années plus tard après une fin de vie difficile (cambriolage, et la mort de ma femme d’un cancer du sein, à ses soixante-dix-neuf ans) je m’éteins en silence, à quatre-vingt-un ans, d’une infection.

Une vie bien remplie donc, que j’ai passé à tout faire pour me sortir de là où j’étais à la base. Au final je suis content d’avoir tenu 81 ans et d’avoir pu être ce que je redoutais ne jamais être avec un départ de partie si décourageant.


Judith Robertson habite Des Moines, dans l’Iowa. De jeunes parents Irene (18 ans) et William (24 ans). Ma seule soeur est Judy, née un an avant moi.

Et là, c’est la partie dite “rigolade”. Celle où on enchaîne les années le sourire au lèvre. Mon seul choix a été à six ans, celui de voler le jouet d’un autre. À treize ans, devant mes résultats excellents, je saute une année et rencontre dans ma nouvelle classe Wayne Stevens. Une rencontre que mes parents désapprouvent complètement, et sous leur pression je romps avec lui (salauds). J’avoue ne pas avoir beaucoup de problème avec les mecs dans mes premières années, et j’en vois défiler beaucoup. Mes études passent sans souci, j’évite l’alcool quand demandé, et même si mon petit ami est envoyé en “academic probation” j’en trouve un autre sous peu.

Bref, je me la coule douce, jusqu’au jour de mes 22 ans où la nouvelle tombe : je suis stérile… bordel. Alors je me réfugie dans l’argent, y a pas de raison. À 23 ans je deviens Technicienne d’Industrie avec une paye d’environ 5000$ par mois. Une paye qui ne cessera d’augmenter tout au long de la partie sous la pression de mes demandes d’augmentation.

À 28 ans je déménage à Los Angeles pour craner avec mon fric. Et le jeu a beau m’informer que mon pays est impliqué dans une guerre et que des soldats sont tués, ’nafout. Ma mère sort de dépression, ce genre de trucs. Trop la joie. Sauf côté mecs. Parce qu’il faut pas se leurrer, comme je suis pas fertile, bizarrement les trois quarts des mecs de mon âge me rejettent après un an. Ainsi j’en voit passer des dizaines, dont notamment Douglas Nichols avec qui j’ai adopté la petite Anna. Un mari aimant donc, qui avec ma chance, mourra d’un cancer de l’estomac peu après. Anecdote drôle : j’ai à un moment été rejeté par “Daniel Gilbertte” \o/ En fait, en vue de l’échec de ma vie de famille, j’ai quitté mon travail pour devenir Inspectrice, un travail qui rapportait à la fin de ma partie une belle somme de plus de 16 000$ par mois. Ouais, en fait, j’ai tout axé sur le fric et ça m’a bien réussi. À la fin de ma partie, j’avais la plus belle maison, je mangeais trois fois plus qu’à ma faim, achetais les yeux fermés, et je trouvais même le temps d’en donner un peu à ces sales pauvres. À partir de ce point, plus rien ne peut vous déranger, on m’a volé deux fois l’une de mes quatre voitures, mes parents sont décédés de vieillesse, ma fille fume, et j’en passe.

Pendant que mon assiette et mon compte en banque se remplissent, j’enchaîne mariage sur mariage, et divorce sur divorce; chaque étape ne durant jamais plus d’un an tant je devais être repoussante à ce moment du jeu.

Et soudainement le jeu m’achève. Alors qu’avec mon personnage né de rien j’ai vécu une longue vie intéressante, CETTE SALLE POURRIE GÂTÉE DE JUDITH MEURT DU DIABÈTE À 63 ANS.

“MAIS C’EST QUOI CE JEU§§”.


Bref, vous l’aurez compris, Real Lives est un jeu très ouvert et pour lequel les récits de partie sont souvent intéressants à lire et à vivre. Ainsi j’ai eu et vu des parties comme policier corrompus au Quebec vivant avec leur tranquille famille, de personnes nées de clochards et se prostituant pour vivre, d’éthiopiens devenus sportifs de haut niveau, et même une partie que j’ai lancée et ai perdu une année plus tard suite à une malformation natale.

Alors même si l’interface repousse un peu au début, j’ai trouvé quelque chose dans ce programme qui le rend intéressant et ce à chaque partie. On ressent tout de même une vraie envie des personnes à l’origine de vous faire prendre conscience des conditions de vie dans d’autres pays, de la difficulté parfois insurmontable à se sortir de sa condition de vie d’origine ; cette idée de nous faire penser à “Et si j’étais pas né en France”.

Si la curiosité vous pique, ça se télécharge par là. Sur ce.

P.S : J’ai pas relu et je suis fatigué. S’il y a des fautes, je m’en fous. Merci de votre attention.

The Winter Throat

Real Lives

Back

Real Lives

article🇫🇷 françaisPublished July 2007 (at 17)#gaming#review2626 words9 mn to read
Real Lives

Il est tout naturel de vouloir vivre la vie d’un autre. Partant de ce principe, Real Lives vous propose à travers un jeu de vous mettre le temps d’une vie dans la peau de quelqu’un d’autre. …Étant assez complexe de décrire le “jeu”, voici comme à l’accoutumée un récit de partie. Avec moins de screenshots que d’habitude, du fait de la relativement pauvre interface du jeu.

Je précise avant quoi que ce soit que pour donner un éventail assez large du jeu, deux parties seront décrites. L’une dans la peau d’un petit garçon né dans une région dite “en développement”, en Birmanie, dans une famille nombreuse — bref, pas gâté par la nature. L’autre, dans l’Iowa aux États Unis, dans la peau d’une petite fille Américaine de famille dans la moyenne si ce n’est légèrement au-dessus. Chacun a ses propres caractéristiques (Intelligence, dons artistiques, force, une jauge de conscience variant selon vos actes, etc) dépendant des parents et du hasard. Ils influent sur votre destin dans le jeu.

Le récit de partie suivra le chronologie de ma partie, se déroulant année après année.


Je m’appelle Totsakan Tomson ; né en Birmanie du centre-ouest à Sagaing. J’ai une mère nommée Tuptim (27 ans) et un père, Pairat (30 ans). J’ai aussi trois frères et trois soeurs dont je me suis si peu préoccupé durant ma partie que leur noms ne seront même presque pas évoqués ailleurs que dans ce paragraphe; leurs noms sont pêle-mêle Pramoj, Lap, Lek, Tui, Kovit et Prang.

Un an après ma naissance, mon quatrième frère Ditaka vient au monde; et l’année suivante la paix est signée dans mon pays. Le jeu ne commençant que vers 6/8 ans à vous laisser les commandes, j’ai assisté toute mon enfance à de joyeux évènements, dont je retiendrai notamment les six maladies de mon père, la mienne, les deux de ma mère, et la mort d’un de mes frères. En général, à ce stade-là, on se dit “WTF” tant le jeu semble vous pourrir sans vous laisser faire quoi que ce soit.

À six ans j’entre à l’école, et il faut alors choisir mes loisirs. N’ayant pas envie de moisir comme une merde dans ce jeu, je mise tout sur ce qui pourrait me sortir de là. Je décoche “Jouer” et coche “Lire/Étudier”. Je coche l’entraînement physique, et le sport. Je me dis qu’à ce stade là ça peut pas faire de mal. Les activités fonctionnent de manière assez étrange dans Real Lives ; de temps en temps le jeu vous en laisse choisir une supplémentaire, vous laissant au fil du temps jongler avec de plus en plus d’activités. Cependant en cas de déménagement par exemple, vous devrez repartir du quota de base avant d’à nouveau vous constituer un emploi du temps organisé vous laissant ajouter une activité, etc.

Toute mon enfance se passe à travers les évènements qui touchent ma famille, dont le départ précipité de plusieurs de mes proches (au sens propre, ils sont pas morts, juste partis de leur propre chef pour travailler, parfois très jeunes) ; ou encore les batailles rangées qui ont lieu régulièrement. Jusque mes douze ans, j’ai pu choisir nombre de nouvelles activités, dont l’étude politique et l’art (que j’ai plus tard abandonné). Et c’est cette même année de mes douze ans que le jeu m’annonce comme si de rien n’était “I became a woman this year after the ceremony of nahtwin.”. …ok, si tu veux copain. Pourtant, bien qu’étant censé être une femme, l’année suivante à treize ans je rencontre Achara, et pour la garder elle et mon avenir, l’année suivante je décide d’esquiver le tabac pour ne pas me moisir mon avenir. Et là c’est le drame. Alors qu’à seize ans je participe à des “efforts humanitaires” bénévolement, mon destin prend un virage serré. Du fait de mes “activités politiques” je suis renvoyé de mon école comme un paria, et envoyé à l’armée. JOIE §

C’est une fois quitté le domicile familial que le jeu commence vraiment. Effectivement, tout d’un coup on est envahi par les choses à gérer. Entre autres le budget mensuel et le compte en banque. Tout content de ma première paye, je place mes 200k sur un compte en banque en attendant les intérêts. Deux ans plus tard… j’ai pas bougé. Ayant vite compris que l’armée m’avait pris sous son aile, j’avais décidé d’y rester et de profiter sagement de la paye. Et ainsi deux ans plus tard, et grâce à l’argent gagné, moi et Achara me marions l’année de mes dix-huit ans. C’est cette année que j’ai décidé d’un peu faire quelque chose de mon argent, en investissant ça et là et en voyant ce qui rapporte vraiment.

L’année suivante, le jeu m’informe que le gouvernement décide de désormais faire des arrestations aléatoires de personnes pour des interrogatoires très sévères ; et bien évidemment, à dix-neuf ans je me fais arrêter et interroger. Ayant juré à mon pote qui suivait la partie que je perdrai pas comme une merde juste parce que le jeu ne m’avait pas gâté, je balance tous ceux qu’il faut. Peu importe si tous ceux avec qui je traînais pour mes activités passées doivent en crever, je comptais pas perdre. Contents de ma collaboration (ouais je suis un connard, et alors) les autorités me relâchent. Cette même année, le mariage s’étant bien passé comme prévu, je quitte cette ville de merde pour Magwe, non loin. Une bonne nouvelle contrastée par une moins bonne, puisque l’année suivante le goitre que j’avais contracté pendant mon enfance, et qui s’était fait oublier, revient de plus belle.

Entre-temps et les années qui suivirent, j’ai vite compris que la seule valeur sûre pour l’investissement, ce sont les territoires. Bien sûr de grosses mises sont requises, mais cela en a toujours valu la peine tout le long de la partie, me permettant de m’enrichir pour peu à peu quitter ma condition initiale. Plus tard, ma femme tombera malade et après un nouveau déménagement, je pars de l’armée pour me faire engager comme vendeur. Et c’est lorsque l’on a enfin un vrai travail que le jeu nous permet de faire quelque chose de génial : harceler notre patron pour une augmentation. Deux ans plus tard, à vingt six ans, ma femme tombe enceinte et mon premier fils naît, un petit garçon que je nomme amoureusement Ittiporn.

L’année suivante fut décisive. Le jeu m’informe qu’une guerre civile vient d’être déclarée en Chine et, craignant pour ma peau, je pars pour Bombay en Inde, un pays qui me promet plus de richesses et une meilleure condition. À trente ans la paix est rétablie. Entre-temps ma femme est devenue voleuse de biens mineurs alors que moi ai continué ma carrière de vendeur me rapportant nombre de roupies. Et c’est l’année suivante que les réjouissances commencent et qu’on découvre l’envers du décors. Ma maison est vandalisée, et une inondation majeure touche l’Inde faisait 1853 morts et 26 000 000 de blessés — une inondation à laquelle j’échappe miraculeusement. Cette même année mon fils a un accident de voiture duquel il ressort sans lésions graves.

Puis passèrent les années, un déménagement, une promotion ; et la naissance d’une fille Abha qui mourra l’année suivante d’une infection respiratoire. Suivie de ma mère, d’une attaque. Cette chère mère qui me lègue la belle somme de 50 000 roupies. C’est à trente-six ans que je quitte mon métier de vendeur pour celui de “forman” (je sais même pas ce que c’est mais ça payait bien). Il faut savoir que le jeu sélectionne les métiers disponibles selon mes qualifications, celles-ci dépendant de mes études et de mon expérience.

À quarante ans j’adopte Roshan, ma deuxième fille, alors que Ittiporn entre dans une école de commerce dans laquelle il sautera même une année FFS. D’ailleurs cinq ans plus tard il déménagera loin de moi. À ce stade-là du jeu j’étais plutôt fier de ma partie, parce que je m’étais quand même bien sorti de la merde. J’avais assez de fric pour assurer une qualité de vie juste un brin de la moyenne, ce qui me suffisait amplement au vu de mon point de départ. Et là, je réalise mon rêve, stupide mais mon rêve : la cinquantaine fraîchement passée, je déménage à Toulon, dans le sud de la France (yay). Cependant, c’est suite à deux cambriolages et au divorce avec ma femme (qui entre-temps était devenue une sale droguée ne ramenant rien à la maison) que se décide un déménagement dans une zone un peu plus tranquille, près de Belfort. C’est même là que j’ai remarqué que le jeu établissait les conditions de vie dans les pays selon des statistiques et des données, sur des échelles de 1 à 7 où 7 est le pire. Ainsi par exemple, la France dans “Droits civiques” et “Droits Politiques” avait 1, alors que non loin “Corruption” affichait 3, ah ha.

À cinquante six ans, divorcé, je pars à la quête d’un nouvel amour. Seulement, les filles se suivent, et après six râteaux, je m’engage yeux fermés avec Marie-Josée (oui, yikes) et lui promet le mariage, ce qui se réalise l’année suivante. Pendant ce temps, ma deuxième fille Roshan se marie avec Jean-Paul Gillette (hqhq) et ils ont ensemble une fille, Renée… je sais pas dans quelle banque de prénoms ils ont pêché, mais je pense qu’on a quand même un beau paquet de trucs infâmes à porter.

À soixante-neuf ans, après avoir quitté le travail de foreman (trop vieux) puis celui de vendeur, j’arrête le travail et déménage en Polynésie Française, à Papeete. Ma retraite m’indique que j’ai assez pour vivre jusqu’à 115 ans… ce que malheureusement mon état de santé, mon goitre et la maladie que j’ai attrapée en Inde, contredisent. Six ans plus tard, une tempête tropicale majeure frappe l’île, ma zone en particulier, et on me demande 19000000 CFP d’investissement, que je donne en voyant la moitié de mes économies partir.

Une tristesse de courte durée, puisque peu d’années plus tard après une fin de vie difficile (cambriolage, et la mort de ma femme d’un cancer du sein, à ses soixante-dix-neuf ans) je m’éteins en silence, à quatre-vingt-un ans, d’une infection.

Une vie bien remplie donc, que j’ai passé à tout faire pour me sortir de là où j’étais à la base. Au final je suis content d’avoir tenu 81 ans et d’avoir pu être ce que je redoutais ne jamais être avec un départ de partie si décourageant.


Judith Robertson habite Des Moines, dans l’Iowa. De jeunes parents Irene (18 ans) et William (24 ans). Ma seule soeur est Judy, née un an avant moi.

Et là, c’est la partie dite “rigolade”. Celle où on enchaîne les années le sourire au lèvre. Mon seul choix a été à six ans, celui de voler le jouet d’un autre. À treize ans, devant mes résultats excellents, je saute une année et rencontre dans ma nouvelle classe Wayne Stevens. Une rencontre que mes parents désapprouvent complètement, et sous leur pression je romps avec lui (salauds). J’avoue ne pas avoir beaucoup de problème avec les mecs dans mes premières années, et j’en vois défiler beaucoup. Mes études passent sans souci, j’évite l’alcool quand demandé, et même si mon petit ami est envoyé en “academic probation” j’en trouve un autre sous peu.

Bref, je me la coule douce, jusqu’au jour de mes 22 ans où la nouvelle tombe : je suis stérile… bordel. Alors je me réfugie dans l’argent, y a pas de raison. À 23 ans je deviens Technicienne d’Industrie avec une paye d’environ 5000$ par mois. Une paye qui ne cessera d’augmenter tout au long de la partie sous la pression de mes demandes d’augmentation.

À 28 ans je déménage à Los Angeles pour craner avec mon fric. Et le jeu a beau m’informer que mon pays est impliqué dans une guerre et que des soldats sont tués, ’nafout. Ma mère sort de dépression, ce genre de trucs. Trop la joie. Sauf côté mecs. Parce qu’il faut pas se leurrer, comme je suis pas fertile, bizarrement les trois quarts des mecs de mon âge me rejettent après un an. Ainsi j’en voit passer des dizaines, dont notamment Douglas Nichols avec qui j’ai adopté la petite Anna. Un mari aimant donc, qui avec ma chance, mourra d’un cancer de l’estomac peu après. Anecdote drôle : j’ai à un moment été rejeté par “Daniel Gilbertte” \o/ En fait, en vue de l’échec de ma vie de famille, j’ai quitté mon travail pour devenir Inspectrice, un travail qui rapportait à la fin de ma partie une belle somme de plus de 16 000$ par mois. Ouais, en fait, j’ai tout axé sur le fric et ça m’a bien réussi. À la fin de ma partie, j’avais la plus belle maison, je mangeais trois fois plus qu’à ma faim, achetais les yeux fermés, et je trouvais même le temps d’en donner un peu à ces sales pauvres. À partir de ce point, plus rien ne peut vous déranger, on m’a volé deux fois l’une de mes quatre voitures, mes parents sont décédés de vieillesse, ma fille fume, et j’en passe.

Pendant que mon assiette et mon compte en banque se remplissent, j’enchaîne mariage sur mariage, et divorce sur divorce; chaque étape ne durant jamais plus d’un an tant je devais être repoussante à ce moment du jeu.

Et soudainement le jeu m’achève. Alors qu’avec mon personnage né de rien j’ai vécu une longue vie intéressante, CETTE SALLE POURRIE GÂTÉE DE JUDITH MEURT DU DIABÈTE À 63 ANS.

“MAIS C’EST QUOI CE JEU§§”.


Bref, vous l’aurez compris, Real Lives est un jeu très ouvert et pour lequel les récits de partie sont souvent intéressants à lire et à vivre. Ainsi j’ai eu et vu des parties comme policier corrompus au Quebec vivant avec leur tranquille famille, de personnes nées de clochards et se prostituant pour vivre, d’éthiopiens devenus sportifs de haut niveau, et même une partie que j’ai lancée et ai perdu une année plus tard suite à une malformation natale.

Alors même si l’interface repousse un peu au début, j’ai trouvé quelque chose dans ce programme qui le rend intéressant et ce à chaque partie. On ressent tout de même une vraie envie des personnes à l’origine de vous faire prendre conscience des conditions de vie dans d’autres pays, de la difficulté parfois insurmontable à se sortir de sa condition de vie d’origine ; cette idée de nous faire penser à “Et si j’étais pas né en France”.

Si la curiosité vous pique, ça se télécharge par là. Sur ce.

P.S : J’ai pas relu et je suis fatigué. S’il y a des fautes, je m’en fous. Merci de votre attention.