Autopergamene
Opeth: And All Would Sneer at my Demise
article🇫🇷 françaisPublished 2010-04-21MusicReview11mn to read

Tout comme pour Nine Inch Nails ceci est principalement un article pour présenter le groupe, si vous connaissez déjà je vous invite à rester pour éventuellement commenter sur la playlist.
By the turnstile beckons a damsel fair **The Face of Melinda** neath blackened hair No joy would flicker in her eyes Brooding sadness came to a rise
Words would falter to atone Failure had passed the stepping stone She sworn her vows to another This is when no-one will bother […]
Still I plotted to have her back Contentment that would fill the crack My soul released a fluttering sigh This day fell, the darkness nigh
Ce que j’aime avant tout sur ce blog dans mes articles musique c’est, non pas forcément aborder des groupes méconnus et faire découvrir la perle rare, mais plutôt m’attarder sur ces gens qui par leur parcours, leur musique ou autre, se démarquent et me donnent quelque chose d’intéressant à dire. Mon amour se porte dans les genres qui s’entremêlent, les artistes qui d’un album à l’autre re-conçoivent leur démarche, j’aime la musique que j’écoute presque autant pour son concept que pour que les images auditives qu’elle est capable de tisser. Partant de ce constat, il y a des artistes que j’écoute et me fascinent, et qui du coup tôt ou tard ne peuvent s’empêcher de terminer en article — c’est en quelque sorte ma manière de rendre hommage à ces personnes que même sans foncièrement apprécier on ne peut qu’admirer.
Opeth – mot supposément emprunté au roman The Sunbird où il signifie « City of the Moon » – c’est avant tout un groupe qu’il est difficile de décrire en une courte phrase sans commencer à énumérer bêtement des noms de genres. De façon à résumer l’idée de manière la plus concise possible, c’est le mariage entre toute la violence et la démesure du death et du metal progressif, avec toute la beauté et la contemplation du rock progressif et du folk/acoustic, ainsi que par moments des éléments de blues et jazz sur les albums les plus récents. Voilà vous voyez ça foire à chaque fois. Ce que signifie concrètement cette assemblage un peu barbare qui à première vue s’annoncerait bancal, c’est qu’Opeth reprend les structures dynamiques et complexes du progressif, et en crée des morceaux alternant tantôt guitare acoustique et de chant lascif, tantôt riffs violents et chant saturé. Pas dans cet ordre, et pas tout le temps, mais vous avez saisi le concept. Sur Allmusic on disait ceci et je trouvais ça bien formulé : « Tracks start and finish in seemingly arbitrary fashion, usually traversing ample musical terrain, including acoustic guitar and solo piano passages, ambient soundscapes, stoner rock grooves, and Eastern-tinged melodies—any of which are subject to savage punctuations of death metal fury at any given moment »
Comme pour Nine Inch Nails, étant donné que le groupe n’est pas aisé à appréhender, je propose une petite playlist découverte à la fin, qui aura pour but à la fois de vous faire connaître Opeth en douceur, mais aussi de briser toute idée reçue que j’aurais pu malgré moi vous donner en écrivant. C’est d’autant plus sensible pour un groupe comme celui-là puisqu’à la moindre mention du mot death la moitié de mes lecteurs vont s’imaginer une grosse bande de chevelus qui hurlent du pâté en secouant la tête. Alors bon certes physiquement je vous l’accorde, mais musicalement, non.
Opeth est un groupe qui avant tout a eu des débuts quelque peu tumultueux ; formé en 1990 en Suède c’est originellement un groupe de death metal pur dont le line-up de départ n’incluait même pas la désormais figure de proue du groupe, Mikael Akerfeldt. Celui-ci est en fait arrivé légèrement après la création du groupe en tant que bassiste, sous la demande du chanteur alors actuel, David Isberg. Le problème c’est que sembla-t-il personne n’avait été prévenu de l’arrivée d’Akerfeldt (y compris le bassiste qu’il était censé remplacer) et légèrement contrariés de ce coup en douce, tout le monde se barra d’Opeth à part Mikael et David. Suivirent trois années du même calibre, avec le line-up du groupe ne cessant de changer au fur et à mesure que les gens rejoignaient et partaient. Au final arrivé comme bassiste, Akerfeld finira par occuper le poste de chanteur et guitariste, place qui sans doute a ô combien participé à pousser le groupe vers sa présente place.
Il faudra attendre 1995, soit cinq ans après la formation du groupe, pour que leur premier album, Orchid sorte. Je ne suis pas vraiment dans la capacité de parler de cet album parce que pour une fois dans un article musical je n’ai pas vraiment toutes les cartes en main : je n’ai jamais écouté leurs deux premiers albums, c’est un fait, je l’avoue. C’est un peu le problème avec les groupes changeants, selon ce qu’on y cherche et ce qu’on en tire, on peu très bien vouer un culte à un album pour ne tomber que de plus haut au suivant. Et étant habitué à ce qu’est Opeth désormais je n’ai jamais trop eu le désir de me plonger dans les années les plus death metal du groupe puisque ce ne sont pas celles qui m’intéressent au final (si, je suis un grand sensible).
I see roots beneath my feet Led me trough wastelands of deceit Rest your head now, don’t you cry Don’t ever ask the reason why
Kept inside our idle race Ghosts of an idol’s false embrace Rest your head now, don’t you cry Don’t ever ask the reason why
La manière dont j’ai connu le groupe est assez particulière. Sans vraiment avoir jamais écouté Opeth, j’avais toujours eu de l’appréhension du fait de l’image que les gens en peignaient en en parlant, à savoir une image résolument death metal donc – un genre que pour être honnête je n’ai jamais trop porté dans mon cœur. J’ai un ami qui en écoutait inlassablement il y a quelques années, et sans doute pas du plus classieux, ça m’en avait coupé l’envie. Et puis un jour alors que j’arpentais Last.fm je suis tombé sur leur fameux morceau Harvest ; un morceau qui s’entame sans le moindre fade in sur un rythme envoutant de guitare acoustique accompagnée par un long chant clair, un beau solo de guitare claire, pas de sang sur les murs, pas de tremblement de terre, j’étais plus ou moins dérouté à la fin du morceau, à me demander si je ne m’étais trompé de page. Voulant savoir de quoi il en retournait j’ai commencé à écouter l’album duquel il était tiré, à savoir Blackwater Park sorti en 2001. Me fiant aux pistes les plus populaires du groupe sur leur profil, j’ai directement entamé par Bleak, la piste qui à elle seule définit presque Opeth, et le miracle s’est produit. Il y avait du death metal, il y avait de la puissance projetée à l’auditeur telle que je l’avais attendue jusque-là , mais j’ai adoré cette piste plus que jamais et maintenant encore c’est une de mes pistes favorites du groupe. Tout simplement parce que tant le break acoustique que le chant clair par-dessus les segments de rythmique acérées faisaient que le tout fonctionnait ensemble à mes oreilles et me faisait passer outre ce fameux chant death métal que je redoutais — mieux, me le faisait apprécier dans son contexte.
C’est tout con mais c’est là que tout le cœur de mon paragraphe réside : contrairement à d’autres groupes que j’ai mentionné tels Nine Inch Nails qui eux aussi faisaient preuve de dualité, ici ce ne sont pas deux univers qui cohabitent et s’effleurent d’un bout de piste à l’autre. Mais plutôt deux parties d’un tout qui sont complémentaires tout autant qu’indépendantes. On passe de pistes surpuissantes comme Blackwater Park qui vous entraînent dans douze minutes de pure épique musique, aux deux Patterns in the Ivy et leurs calme et fluide ligne de guitare acoustique portée par un faible chant clair intimiste. C’est là que l’originalité et la force du groupe résident et c’est ça qui fait qu’ils ne sont pas n’importe qui, ils mêlent des mélodies jazz, du piano, du metal, du folk et en font un tout cohérent. En quelque sorte c’est du metal progressif mais retranché plus loin que jamais dans ses extrêmes.
The sigh of summer upon my return Fifteen alike since I was here Bathed in deep fog, blurring my trail Snuffing the first morning rays
Weary from what might have been ages Still calm with my mind at peace Would I prosper or fall, drain the past The lapse of the moment took it’s turn […]
Pale touch, writhing in the embers Damp mud burning in my eyes All the faces turned away And all would sneer at my demise
S’il y a une chose qui m’a beaucoup frappé aussi au commencement c’est bien évidement la performance de Mikael Åkerfeldt. Comme beaucoup de groupes de metal progressif, Opeth aussi possède sa propre figure iconique au centre de la scène ; l’homme qui derrière les albums en fabrique les concepts et qui du bout de sa plume emporte le public. Un point sur lequel Mikael ne faillit pas, déjà parce qu’il a un aisance incroyable à l’écrit pour un artiste né dans le death metal, que ce soit par la manière lyrique et poétique qu’il a d’approcher ses thèmes que les thèmes eux-mêmes. C’est vraiment un groupe dont il est plaisant de tirer des bouts de paroles à mettre dans l’article parce que chaque piste est vraiment pensée comme un poème et ça se sent à la lecture.
Second point qui frappe : la fluidité avec laquelle il manie la guitare acoustique et sa capacité à créer et mêler des couches de mélodies avec. Toute l’introduction de Benighted ou l’étouffée mélopée qui entoure la puissante Dirge for November, ce sont des thèmes qui restent en tête pour tant que l’on apprécie le style. Akerfeldt prépare même un album solo de guitare acoustique en marge d’Opeth, pour mettre au-devant de la scène des mélodies qu’il a composées en cours de route mais qui jusque là n’avaient pas trouvé pas leur place. Ensuite le chant est à l’image de ce jeu acoustique : inattendu. Je ne sais pas si c’est parce que je n’y connaissais rien (sans doute) ou parce que je me basais sur une poignée d’artistes fonctionnant comme ça, mais j’avais toujours imaginé que les groupes où se partageaient plusieurs styles de chant avaient en réalité deux chanteurs — pour les groupes qui ne modulent pas leur voix tout du moins. J’ai cru ça d’Opeth pendant un long moment jusqu’à ce que je regarde un live de Bleak toujours dans mes premières écoutes de Blackwater Park. C’est là que j’ai réalisé qu’Akerfeldt prenait ces deux places au-devant de la scène et le voir passer, dans des morceaux comme The Moor, d’un style de chant à l’autre au détour d’une phrase fait partie des choses qui marquent quand on découvre ce groupe. Bien sûr il y a des tas d’artistes qui sans doute partage cela, mais à mes yeux ce qui fait la force d’Akerfeldt c’est qu’il est à l’aise dans ces deux styles et propose un chant clair vraiment maîtrisé, mélodique, et large dans sa capacité. Je ne sais pas si tous les artistes de death metal seraient en mesure de chanter certains récents morceaux d’Opeth tel Burden où le chemin parcouru saute immédiatement aux yeux.
Trees bend their boughs toward the earth. And nighttime birds float as black faces. […]
You have nothing more to find. You have nothing more to lose. The cold season drifts over the land. They huddle in the brown corners.
S’il est une période du groupe qu’il est inévitable de mentionner c’est Damnation et Deliverance. Sortis respectivement en 2003 et 2002, ce sont deux albums qui grossièrement, ont été composés dans l’optique de cristalliser tout ce qui alors constituait Opeth. Prendre ces deux extrêmes qui animaient le groupe et les séparer comme deux frères à la naissance. Le résultat en est ce double album. À gauche nous avons Deliverance, à ce jour décrit comme un des albums les plus intenses faits par Opeth — ça ne veut pas dire le plus violent, simplement tous ces temps de battement et de répit qui d’habitude peuplent leurs albums, ont ici été écartés pour ne laisser qu’un échantillon du plus sombre de ce qu’ils sont capables de faire. D’une quelque manière c’est un long plongeon dans un retour aux racines du groupe et en ressortir c’est non seulement ne pas en ressortir indemne mais c’est aussi reprendre souffle comme après une longue apnée. De l’autre côté, Damnation délaisse absolument tout aspect ne serait-ce que vaguement metal, et se livre à un long album entièrement acoustique entrecoupé d’une pincée de pistes rock progressif et jazz dont leur désormais connue Windowpane. La nuance à ajouter c’est que jeu acoustique ne signifie pas jeu joyeux, et certaines pistes même à la guitare folk sonnent et se ressentent bel et bien comme du métal lointain.
Dans les deux albums l’utilisation de styles qui s’opposent n’empêche que l’ambiance propre à Opeth est indéniablement présente et c’est une performance assez admirable qui prouve qu’en tant d’années ils ont réussi à se forger une patte qui leur est propre et qui désormais fait partie de tout ce qu’ils font même sans qu’ils y prêtent attention. Sans que Deliverance soit un album dans lequel j’ai vraiment réussi à me plonger hormis quelques pistes dont la piste éponyme, j’admire beaucoup la démarche et la mise en opposition (la délivrance par la violence) des deux facettes d’Opeth.
Summer is miles and miles away And no one would ask me to stay And I should contemplate this change, to ease the pain And I should step out of the rain, and turn away
Avec du recul, et ça se ressentira sans doute malgré moi dans ma sélection, j’ai conscience que j’ai toujours été attiré par leur côté le plus calme, pour au final être happé par leur autre côté et rester à écouter tout. C’est un groupe qui de toute manière au cours de ces dernières années s’est de plus en plus éloigné de ses origines, de manière complètement ouverte sur des albums comme Watershed ou au final le compte de pistes vraiment fidèles à leurs début se compte sur les doigts d’une main atrophiée. C’est un groupe qui est devenu de plus en plus complexe à définir au point qu’eux-mêmes en interviews se refusent à s’apparenter à un genre. D’une certaine manière ils étaient à un endroit précis, et c’est comme s’ils avaient décidé d’aller s’aventurer toujours plus loin au point que les frontières de ce qui était vraiment leur maison en deviennent troubles.
Alors certes et je tiens à le rappeler à la fin de l’article, ça reste un groupe de metal progressif dans ses grandes lignes et après tant de mots versés je ne veux pas induire en erreur ceux qui ne connaissent pas : oui il y a du death metal dedans, il n’y a pas que ça, mais ça reste une partie intégrante et importante d’Opeth. Mais s’ils ont réussi à me convaincre et me faire passer outre mon aversion, c’est qu’il y a véritablement quelque chose de particulier dans leur musique, d’unifiant et d’indescriptible. Je pense que plutôt que de continuer il est temps de vous laisser en musique.
Étant donné qu’un article musique ne le serait vraiment sans quelque chose à écouter, je vous propose comme à l’accoutumée une petite playlist découverte d’Opeth. Tout comme pour Nine Inch Nails elle est divisée en sous-parties et tout comme pour NIN, tentez au moins d’écouter une ou deux sections en entier avant de réellement vous forger un avis. J’ai quand même tenté de mêler un peu de toute la discographie du groupe — une vingtaine de pistes pour un tour d’horizon de douze ans d’histoire. J’espère en toute franchise que les fans de la première heure ne me tomberont pas sur le dos pour avoir omis leurs deux premiers albums, et espère avoir été fidèle dans ma retranscription du groupe malgré les blancs laissés.
Prologue : Prologue (de My Arms, Your Hearse)
— This Day Fell — The Face of Melinda (de Still Life) Burden (de Watershed) Porcelain Heart (de Watershed) Patterns in the Ivy II (de Blackwater Park) Hours of Wealth (de Ghost Reveries) Epilogue (de My Arms, Your Hearse)
— The Darkness Nigh — The Moor (de Still Life) Bleak (de Blackwater Park) Dirge for November (de Blackwater Park) Interlude : Madrigal (de My Arms, Your Hearse) When (de My Arms, Your Hearse) Reverie / Harlequin Forest (de Ghost Reveries) Blackwater Park (de Blackwater Park)
— Into the Night — Benighted (de Still Life) Harvest (de Blackwater Park) Windowpane (de Damnation) In My Time of Need (de Damnation) A Fair Judgement (de Deliverance) Coil (de Watershed)
— When Days Are Done — Hessian Peel (de Watershed) The Baying of the Hounds (de Ghost Reveries) Serenity Painted Death (de Still Life) Beneath the Mire (de Ghost Reveries) Deliverance (de Deliverance)