Autopergamene

Vices Versa

storyđŸ‡«đŸ‡· françaisPublished 2002-01-016mn to read
Vices Versa

La voiture roulait depuis un nombre incalculable d’heures. Julia s’était assoupie, depuis le dĂ©part, tĂŽt dans la nuit. Ils Ă©taient en route pour Eeradon, un des villages du massif de Shadows Hills. Le massif entourait les villages et ne s’arrĂȘtait qu’en un point ou passait deux routes qui longeaient les collines. Ce point Ă©tait recouvert d’une Ă©paisse foret trĂšs sombre. Et la troisiĂšme route, qui ne longe aucune colline mais qui mĂšne directement aux villages, passe par cette foret, et traverse le village de Shadow Gates.

La berline grise s’arrĂȘta sur le bas cotĂ©. Cela devait faire une bonne demi heure qu’ils avaient l’impression de tourner en rond. Le pĂšre de Julia descendit de la voiture et se saisit d’une branche. Puis il dessina une croix au sol. Il rĂ©veilla Julia et lui dit que si en roulant elle voit a nouveau la croix c’est qu’ils tournent en rond. Julia se mit alors Ă  fixer le sol, en se frottant les yeux. Mais elle ne revit pas la croix, juste une longue route dont on ne voyait pas le bout dans la nuit. Et deux hommes marchaient, deux hommes dans de vieux habits dĂ©chirĂ©s.

La voiture s’arrĂȘta Ă  cotĂ© d’eux. Le pĂšre ouvrit la fenĂȘtre cĂŽtĂ© passager et demande poliment si ils voulaient qu’ils les prennent. Le second homme fit quelques pas en arriĂšre. Mais le premier s’avance dans la lumiĂšre et dĂ©voila deux yeux orange. Soudain sa mĂąchoire s’agrandit, il saisit Julia par le pull et hurla d’un cri lourd et rauque. Le pĂšre appuya sur l’accĂ©lĂ©rateur de toute sa force. Mais l’homme planta quatre griffes dans la portiĂšre arriĂšre et tenta d’atteindre Julia au cou. Elle hurlait et tournait le plus vite possible la poignĂ©e de la vitre. Puis elle finit par appuyer sur la poignĂ©e de la vitre avec son pied, ce qui referma violemment la vitre, arrachant quelques doigts Ă  cette chose. Le monstre s’envola et atterrit dans la foret. La voiture roula, la destination, rien Ă  faire. Juste rouler. Mais Julia revit alors la croix au sol, elle ne dit rien car elle savait que ce n’était pas le moment.

Le pĂšre de Julia s’arrĂȘta quelques instants. Dans un petit coin calme, une sorte d’arrĂȘt pour les voyageurs. Ils descendirent et admirĂšrent quelques instants la nuit pour oublier ce qu’il venait d’arriver. « Vous verrez, disait l’oncle Eddie, une fois passĂ© le porche, c’est tout droit ! ». Et pourtant, une fois passĂ© le porche n’a cessĂ© de s’enchaĂźner des virages, des carrefours et autres. Quand Julia entendit son pĂšre dire ça, elle lui demanda alors si ils Ă©taient bien sur la bonne route. Mais les panneaux « Road 83 » le long de la route Ă©taient pourtant bel et bien la.

Julia demanda alors a son pĂšre si elle pouvait marcher quelques instants sans s’éloigner. Son pĂšre hĂ©sita, et pensa qu’au point ou ils en Ă©taient, si elle tombait sur la sortie ça l’arrangerait. Il lui donna la lampe, et s’assit sur le capot, tout relisant et en parcourant la carte routiĂšre.

Julia marcha assez longtemps, slalomant entre les arbres. Puis elle dĂ©boucha quelque part. Une sorte d’immense trou creusĂ© dans le sol, un mini canyon. Elle se mit a plat ventre et rampa jusqu’au bord. Sans se faire voir, car en bas, il y avait des gens. Des gens, et des loups. Elle vit toute d’ici. Tout d’abord des hommes se mettait d’un cotĂ©, et ils en dĂ©signer un parmi les autres. Au sol, il y avait un grand cercle rouge tracĂ© avec
avec quelque chose que Julia n’imagina pas. L’homme s’asseyait au centre. Puis on emmenait un loup dans le cercle. Et un autre homme avec un crĂąne de loup sur la tĂȘte s’avançait vers eux et se mettait a prononcer des paroles incomprĂ©hensibles. En latin, ou en une vieille langue qu’on force Julia a apprendre a l’école. Julia entendait de la ou elle Ă©tait, comme dans les vieux théùtres, la forme du cratĂšre portait le son partout, a cause de l’écho ou de la rĂ©sonance, quelque chose comme ça. Julia se mit a rĂ©pĂ©ter chaque chose que disait l’homme, elle voulait le dire a son pĂšre pour lui expliquer, il saurait peut ĂȘtre mieux qu’elle. Elle fixait attentivement le loup, il ne bougeait pas, rien.

Puis l’homme, le prĂȘtre, prononça les derniers mots. Le loup se mit alors Ă  bouger, dans tout les sens, a hurler le martyr. Des hommes le tenait et l’empĂȘcher de fuir. Il se mit a lors a recracher quelque chose, du sang, et surtout une sorte de forme organique sans rĂ©elles couleurs. Le prĂȘtre coupa le fil qui reliait la forme au loup. Le loup s’étala au sol. Et ne se releva jamais plus. L’homme avala la forme de force, et fut prit de contractions. Il hurla a son tour. Ses yeux devirent orange vif, tels ceux du loup. Ses dents s’allongĂšrent, tels celles du loup, ses griffes sortirent, tels celles du loup. Un long pelage lui poussa, tels celui du loup. Pendant ce temps, le loup se relevait, grossissait, devenait monstrueux.

Et l’homme devint bĂȘte, et la bĂȘte devint homme.

S’en rĂ©sultaient deux monstres aux pulsions meurtriĂšres. L’homme garda ses vieux habits, dĂ©chirĂ©s par la grosseur de la masse musculaire qui l’avait atteint soudainement.

Julia n’en croyait pas ces yeux, c’était donc ça les deux hommes qu’ils avaient croisĂ©, deux lycanthropes en quĂȘte de chaire.

Julia se leva et laissa tomber une roche en bas. Le l’homme loup et le loup humain fixĂšrent Julia. Le prĂȘtre haussa les sourcils, et dit deux autres mots. On entendit au loin les bruits de centaines de pas. De pas de crĂ©atures de cauchemars qui se ruaient touts ensemble sur Julia.

Elle couru de toute ses forces a travers la foret, suivant ses pas a contre sens. Mais lorsqu’elle arriva Ă  la voiture, elle ne trouva que le corps de son pĂšre en mauvais Ă©tat. Elle mit le corps de son pĂšre sur le siĂšge passager. Sans hĂ©siter elle monta dans la voiture. Elle ne savait pas trĂšs bien conduire mais assimila vaguement le fonctionnement. Elle fonça, et au loin, il y avait un nuage de fumĂ©e. On distinguait des milliers de loups, et d’autres monstres horribles dont on rĂȘve la nuit.

Julia pleurait, son pĂšre Ă©tait en sang et ne respirait presque plus. Alors, elle eut un dĂ©clic, et fonça en plein cƓur de la foule, Ă©crasant des monstres a la chaĂźne. Des monstres, ressemblant a des aigles foncĂšrent en piquĂ© sur la voiture, brisant vitres et pare brise et tentant de tuer Julia. La voiture prenait de la vitesse, devant eux se dressait un loup plus gros que les autres, il hurla. Julia lĂącha le volant pour se boucher les oreilles et la voiture vint s’écraser Ă  pleine vitesse contre un arbre.

Trou noir.

Le soleil venait de se lever, la nuit s’en alla et la route redevint normale. Car tout les soirs, a la nuit tombĂ©e, le porche mĂšne a une autre route, ou se dĂ©roule des choses inhabituelles.

Il y a des annĂ©es, un homme trouva le moyen de transfĂ©rer deux Ăąmes dans deux corps. ‘Vice Versa’. Il fut tuĂ©, et la formule volĂ©. Des lors, des rituels se dĂ©roulent chaque soir pour crĂ©er une armĂ©e de monstre qui dĂ©truira la terre. Leur secret n’est gardĂ© que par la magie de cette foret.

Julia lĂšve difficilement la tĂȘte. Son pĂšre est mort. Elle longe la route et dĂ©bouche finalement hors de la foret, elle repasse enfin le porche et s’agenouille sur le cotĂ©. Un loup vient lui lĂ©cher le visage. Elle rit, le jour se lĂšve, les loups retrouvent leur libertĂ© et leur gentillesse. Du moins ceux ci. Elle caresse quelques moments le loup, et lui parle comme si elle parlait a son pĂšre, passĂ© dans le corps du loup. Et comme si le loup n’avait pas Ă©tĂ© la, Julia lui raconte ce qui vient de lui arriver. La route, les deux hommes, le cratĂšre, ce qu’a dit le prĂȘtre
 Et sur ces mots, le loup se remue, il se met a hurler, et recrache cette boule informe et incolore qu’on appelle « L’ñme ». Cette boule entre dans la gorge de Julia qui se met a hurler a son tour et a cracher du sang. Au loin, on entend des hurlements dans l’Aube.

TĂŽt le matin, la ou personne ne passe.

Au bord de la route 83, la femme devint bĂȘte, et la bĂȘte devient femme.

© 2025 - Emma Fabre - About

Vices Versa

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Vices Versa

La voiture roulait depuis un nombre incalculable d’heures. Julia s’était assoupie, depuis le dĂ©part, tĂŽt dans la nuit. Ils Ă©taient en route pour Eeradon, un des villages du massif de Shadows Hills. Le massif entourait les villages et ne s’arrĂȘtait qu’en un point ou passait deux routes qui longeaient les collines. Ce point Ă©tait recouvert d’une Ă©paisse foret trĂšs sombre. Et la troisiĂšme route, qui ne longe aucune colline mais qui mĂšne directement aux villages, passe par cette foret, et traverse le village de Shadow Gates.

La berline grise s’arrĂȘta sur le bas cotĂ©. Cela devait faire une bonne demi heure qu’ils avaient l’impression de tourner en rond. Le pĂšre de Julia descendit de la voiture et se saisit d’une branche. Puis il dessina une croix au sol. Il rĂ©veilla Julia et lui dit que si en roulant elle voit a nouveau la croix c’est qu’ils tournent en rond. Julia se mit alors Ă  fixer le sol, en se frottant les yeux. Mais elle ne revit pas la croix, juste une longue route dont on ne voyait pas le bout dans la nuit. Et deux hommes marchaient, deux hommes dans de vieux habits dĂ©chirĂ©s.

La voiture s’arrĂȘta Ă  cotĂ© d’eux. Le pĂšre ouvrit la fenĂȘtre cĂŽtĂ© passager et demande poliment si ils voulaient qu’ils les prennent. Le second homme fit quelques pas en arriĂšre. Mais le premier s’avance dans la lumiĂšre et dĂ©voila deux yeux orange. Soudain sa mĂąchoire s’agrandit, il saisit Julia par le pull et hurla d’un cri lourd et rauque. Le pĂšre appuya sur l’accĂ©lĂ©rateur de toute sa force. Mais l’homme planta quatre griffes dans la portiĂšre arriĂšre et tenta d’atteindre Julia au cou. Elle hurlait et tournait le plus vite possible la poignĂ©e de la vitre. Puis elle finit par appuyer sur la poignĂ©e de la vitre avec son pied, ce qui referma violemment la vitre, arrachant quelques doigts Ă  cette chose. Le monstre s’envola et atterrit dans la foret. La voiture roula, la destination, rien Ă  faire. Juste rouler. Mais Julia revit alors la croix au sol, elle ne dit rien car elle savait que ce n’était pas le moment.

Le pĂšre de Julia s’arrĂȘta quelques instants. Dans un petit coin calme, une sorte d’arrĂȘt pour les voyageurs. Ils descendirent et admirĂšrent quelques instants la nuit pour oublier ce qu’il venait d’arriver. « Vous verrez, disait l’oncle Eddie, une fois passĂ© le porche, c’est tout droit ! ». Et pourtant, une fois passĂ© le porche n’a cessĂ© de s’enchaĂźner des virages, des carrefours et autres. Quand Julia entendit son pĂšre dire ça, elle lui demanda alors si ils Ă©taient bien sur la bonne route. Mais les panneaux « Road 83 » le long de la route Ă©taient pourtant bel et bien la.

Julia demanda alors a son pĂšre si elle pouvait marcher quelques instants sans s’éloigner. Son pĂšre hĂ©sita, et pensa qu’au point ou ils en Ă©taient, si elle tombait sur la sortie ça l’arrangerait. Il lui donna la lampe, et s’assit sur le capot, tout relisant et en parcourant la carte routiĂšre.

Julia marcha assez longtemps, slalomant entre les arbres. Puis elle dĂ©boucha quelque part. Une sorte d’immense trou creusĂ© dans le sol, un mini canyon. Elle se mit a plat ventre et rampa jusqu’au bord. Sans se faire voir, car en bas, il y avait des gens. Des gens, et des loups. Elle vit toute d’ici. Tout d’abord des hommes se mettait d’un cotĂ©, et ils en dĂ©signer un parmi les autres. Au sol, il y avait un grand cercle rouge tracĂ© avec
avec quelque chose que Julia n’imagina pas. L’homme s’asseyait au centre. Puis on emmenait un loup dans le cercle. Et un autre homme avec un crĂąne de loup sur la tĂȘte s’avançait vers eux et se mettait a prononcer des paroles incomprĂ©hensibles. En latin, ou en une vieille langue qu’on force Julia a apprendre a l’école. Julia entendait de la ou elle Ă©tait, comme dans les vieux théùtres, la forme du cratĂšre portait le son partout, a cause de l’écho ou de la rĂ©sonance, quelque chose comme ça. Julia se mit a rĂ©pĂ©ter chaque chose que disait l’homme, elle voulait le dire a son pĂšre pour lui expliquer, il saurait peut ĂȘtre mieux qu’elle. Elle fixait attentivement le loup, il ne bougeait pas, rien.

Puis l’homme, le prĂȘtre, prononça les derniers mots. Le loup se mit alors Ă  bouger, dans tout les sens, a hurler le martyr. Des hommes le tenait et l’empĂȘcher de fuir. Il se mit a lors a recracher quelque chose, du sang, et surtout une sorte de forme organique sans rĂ©elles couleurs. Le prĂȘtre coupa le fil qui reliait la forme au loup. Le loup s’étala au sol. Et ne se releva jamais plus. L’homme avala la forme de force, et fut prit de contractions. Il hurla a son tour. Ses yeux devirent orange vif, tels ceux du loup. Ses dents s’allongĂšrent, tels celles du loup, ses griffes sortirent, tels celles du loup. Un long pelage lui poussa, tels celui du loup. Pendant ce temps, le loup se relevait, grossissait, devenait monstrueux.

Et l’homme devint bĂȘte, et la bĂȘte devint homme.

S’en rĂ©sultaient deux monstres aux pulsions meurtriĂšres. L’homme garda ses vieux habits, dĂ©chirĂ©s par la grosseur de la masse musculaire qui l’avait atteint soudainement.

Julia n’en croyait pas ces yeux, c’était donc ça les deux hommes qu’ils avaient croisĂ©, deux lycanthropes en quĂȘte de chaire.

Julia se leva et laissa tomber une roche en bas. Le l’homme loup et le loup humain fixĂšrent Julia. Le prĂȘtre haussa les sourcils, et dit deux autres mots. On entendit au loin les bruits de centaines de pas. De pas de crĂ©atures de cauchemars qui se ruaient touts ensemble sur Julia.

Elle couru de toute ses forces a travers la foret, suivant ses pas a contre sens. Mais lorsqu’elle arriva Ă  la voiture, elle ne trouva que le corps de son pĂšre en mauvais Ă©tat. Elle mit le corps de son pĂšre sur le siĂšge passager. Sans hĂ©siter elle monta dans la voiture. Elle ne savait pas trĂšs bien conduire mais assimila vaguement le fonctionnement. Elle fonça, et au loin, il y avait un nuage de fumĂ©e. On distinguait des milliers de loups, et d’autres monstres horribles dont on rĂȘve la nuit.

Julia pleurait, son pĂšre Ă©tait en sang et ne respirait presque plus. Alors, elle eut un dĂ©clic, et fonça en plein cƓur de la foule, Ă©crasant des monstres a la chaĂźne. Des monstres, ressemblant a des aigles foncĂšrent en piquĂ© sur la voiture, brisant vitres et pare brise et tentant de tuer Julia. La voiture prenait de la vitesse, devant eux se dressait un loup plus gros que les autres, il hurla. Julia lĂącha le volant pour se boucher les oreilles et la voiture vint s’écraser Ă  pleine vitesse contre un arbre.

Trou noir.

Le soleil venait de se lever, la nuit s’en alla et la route redevint normale. Car tout les soirs, a la nuit tombĂ©e, le porche mĂšne a une autre route, ou se dĂ©roule des choses inhabituelles.

Il y a des annĂ©es, un homme trouva le moyen de transfĂ©rer deux Ăąmes dans deux corps. ‘Vice Versa’. Il fut tuĂ©, et la formule volĂ©. Des lors, des rituels se dĂ©roulent chaque soir pour crĂ©er une armĂ©e de monstre qui dĂ©truira la terre. Leur secret n’est gardĂ© que par la magie de cette foret.

Julia lĂšve difficilement la tĂȘte. Son pĂšre est mort. Elle longe la route et dĂ©bouche finalement hors de la foret, elle repasse enfin le porche et s’agenouille sur le cotĂ©. Un loup vient lui lĂ©cher le visage. Elle rit, le jour se lĂšve, les loups retrouvent leur libertĂ© et leur gentillesse. Du moins ceux ci. Elle caresse quelques moments le loup, et lui parle comme si elle parlait a son pĂšre, passĂ© dans le corps du loup. Et comme si le loup n’avait pas Ă©tĂ© la, Julia lui raconte ce qui vient de lui arriver. La route, les deux hommes, le cratĂšre, ce qu’a dit le prĂȘtre
 Et sur ces mots, le loup se remue, il se met a hurler, et recrache cette boule informe et incolore qu’on appelle « L’ñme ». Cette boule entre dans la gorge de Julia qui se met a hurler a son tour et a cracher du sang. Au loin, on entend des hurlements dans l’Aube.

TĂŽt le matin, la ou personne ne passe.

Au bord de la route 83, la femme devint bĂȘte, et la bĂȘte devient femme.

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